Ces bobolaises porteuses de bracelets à la cheville : “elles ne sont pas toutes prostituées…”

Depuis longtemps, dans plusieurs pays d’Afrique, les chaînes de cheville ont été des sujets à polémique et continuent de l’être. En effet, ces filles ou femmes qui portent ces bijoux et surtout au « mauvais endroit » du corps sont régulièrement objet de préjugés. Ainsi, chaque personne selon ses convictions, et/ou sa culture a un jugement individuel de cette pratique. Mais malgré le fait que cette pratique constitue parfois sujet à polémique, c’est une mode qui prend de plus en plus d’ampleur. Constat à Bobo-Dioulasso avec une équipe de Ouest Info.

D’origine indienne, le port de bracelets ou de chaîne à la cheville a longtemps été considéré dans la plupart des cas, surtout dans les pays de l’ouest de l’Afrique, comme les signes d’une femme de mauvaise vie. D’après les bruits de couloir, le port de chaîne à la cheville voile des messages codés entre les adeptes.

En effet, il se dit qu’en principe, si une femme porte le bracelet ou chaîne à sa cheville droite, cela voudrait dire qu’elle est mariée. Mais si elle le porte à la cheville gauche, elle est célibataire. Par contre certaines autres adeptes ne voient en ce bijou que beaucoup de femmes chérissent, son côté esthétique.

C’est ce que fait comprendre Stéphanie Bama, jeune élève en classe de 1ère et portant son bracelet à la cheville gauche. Non encore mariée, la jeune élève donne ses raisons à elle à l’utilisation de ce bijou à la cheville. « Je trouve ça vraiment joli et c’est beaucoup à la mode en ce moment. La preuve est que sur le marché beaucoup de femmes en vendent et elles y gagnent beaucoup d’argent. Un bracelet de cheville coûte entre 1000f et 2000f, ce qui leur fait un bon chiffre d’affaires», se justifie-t-elle.

Elle n’occulte cependant pas les vieux  préjugés qui continuent de coller une étiquette négative aux filles et femmes porteuses de colliers aux chevilles.

« On dit que les femmes qui portent les bracelets de cheville sont des prostituées, et beaucoup de gens ne se gênent même pas dans la manière de m’observer. Lorsque je vais en cours par exemple, je m’applique à ce que mon bracelet soit visible à ma cheville et qu’elle scintille car comme je l’ai dit, j’en porte parce que c’est joli. En arrivant dans le parking de l’école, les regards des gens du lycée se portent beaucoup sur moi à cause de cela et j’en suis consciente. Quand certains regards se font insistants, je leur dis tout simplement que s’ils aiment beaucoup mon bracelet, je peux le leur en offrir. Il suffit de demander», explique Stéphanie Bama qui, visiblement, fait partie des porteuses de ces bijoux, qui se moquent des préjugés.

Comme Stéphanie, Kadi Bamba, femme d’affaire mariée et mère de deux enfants, est porteuse de collier à la cheville. Elle ne manque jamais l’occasion d’amener les détracteurs de ce bijou à respecter son choix. Elle précise que c’est parce que son époux adore ce bijou qu’elle prend du plaisir à le porter. « Avant même d’être mariée je ne portais pas ce bijou. C’est après mon mariage que j’ai commencé à en mettre, parce que mon mari m’a dit qu’il aimait ça. Ce n’est pas que ça d’ailleurs, il y a aussi les perles de reins et autres. Les gens diront toujours ce qu’ils veulent mais ce n’est pas du tout vrai. Etant une femme mariée, je porte mes bracelets de cheville et je sors avec, sans aucune gêne. Tout est une question de culture et je n’ai vu nulle part si ce n’est qu’au Burkina, que ce bijou est destiné aux prostituées. Ce sont les rumeurs qui ont fini par mettre cette idée dans la tête de tout le monde. Et c’est déplorable. C’est triste de voir qu’en plein 21ème siècle il y ait toujours ce genre de mentalités », se défend-t-elle.

Les avis sont bien entendu partagés sur le sujet. Si les uns pensent que le monde a évolué et que les bracelets de cheville doivent être normalisés, les autres pensent que c’est toujours la « marque » des travailleuses du sexe. Plusieurs hommes d’ailleurs condamnent le port de ce bijou.

« Quand une femme porte ce genre de choses, je la classe directement dans une catégorie…. »

C’est le cas d’Olivier Guindo qui trouve que ça ne donne pas une bonne image de la femme. « Quand une femme porte ce genre de choses, je la classe directement dans une catégorie. Ç’a toujours été comme ça et les choses ne peuvent pas changer. Une chose est sûre, ma femme ne portera jamais ce genre de choses», martèle-t-il d’un ton calme mais ferme.

Dans la logique d’Olivier, beaucoup de femmes refusent de porter ce bijou car selon elles, ça dégrade vraiment leur image. Elles ont peur du regard de la société donc elles préfèrent ne pas s’adonner à cela. C’est le cas de Nadine Kaboré, étudiante et commerçante, qui aime bien l’aspect que donne les bracelets aux chevilles, mais qui ne peut en porter par peur des préjugés. « Je sais que le monde évolue, mais nous sommes en Afrique et nous devons être réalistes. Nous n’avons pas la même mentalité que les occidentaux et même si certaines personnes commencent à avoir l’esprit plus ouvert, il n’en demeure pas moins que les autres se mêleront toujours de la vie des autres. Dans mon milieu, les gens ne sont pas du tout faciles. Je vois beaucoup de filles porter les chaînes aux pieds et ça donne envie d’en mettre aussi, mais je n’ose pas. Je n’oserai jamais car je me soucie du regard qu’on me portera», souligne Nadine Kaboré.

De cette pratique, le moins que l’on peut dire, c’est qu’elle prend de l’ampleur sous nos cieux même beaucoup de gens ont encore du mal à la voir d’un bon œil.

Linda Maïssar Gueye, Stagiaire

Source: Ouest Info

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