Mamata Tiendrébogo : « une seule femme à la Ceni est une interpellation de la conscience collective »

Un sentiment d’honneur et d’insatisfaction. C’est ce qui anime Mamata Tiendrebeogo, unique femme à la Commission électorale nationale indépendante. L’ancienne parlementaire estime que la problématique de la promotion des compétences féminines est très profonde tant au niveau politique que  dans société civile burkinabè.

Qu’est-ce que cela vous fait d’être l’unique femme commissaire à la Ceni ?

C’est un honneur d’avoir été choisie par la majorité  pour les représenter à la Ceni. J’en suis heureuse, honorée et reconnaissante à la majorité burkinabè. Toutefois pour un constat général ce n’est pas une satisfaction. Ce n’est pas une fierté pour moi d’être seule dans cette instance électorale. Cela me renvoie à un examen de conscience personnelle mais surtout à une interpellation sur la conscience collective. Je suis engagée depuis près d’une dizaine d’année dans la promotion du genre. Si je me retrouve à être, seule, à la Ceni, cela veut dire qu’à quelque part il y a une limite dans la lutte. Nous n’avons certainement pas compris certaines situations. Avons-nous par exemple pu évaluer l’impact de la promotion des compétences sur les chapelles politiques et le choix des organisations de la société civile ? Un tel constat voudrait dire que nous devons revoir la lutte pour une meilleure prise en compte des femmes dans les sphères de décision. Au-delà de la volonté politique parce qu’à tout moment on ramène aux politiques, je pense qu’au niveau des OSC, il n’y a pas aussi de promotion de compétences féminines. Le problème est très profond, et l’on peut dire que demain n’est pas la veille.

Sauriez-vous vous s’imposer ?

Quand on est dans un groupe de travail, la priorité n’est pas de s’imposer mais de savoir convaincre par ses idées, de savoir convaincre par sa capacité d’adaptation et à bien faire. Il faut savoir proposer des idées qui puissent faire l’unanimité. Je ne cherche pas à m’imposer face à qui ce que soit, je cherche à jouer mon rôle pour un meilleur rendu. Je suis la seule femme, certes, depuis un certain temps, j’évolue dans un milieu d’homme. Il n y’ a rien donc de nouveau. Je ne suis pas là pour concurrencer, je suis plutôt là pour apporter ma touche. Je suis à la Ceni pour travailler à ce que la population puisse s’approprier de notre travail, le comprendre, l’accepter et l’apprécier à sa juste valeur. J’ai foi que nous allons nous comprendre. Il faut avoir de la personnalité, de la carrure, du discernement et le courage de travailler. Etre femme n’est pas une faiblesse, ni une limite.

La lutte contre la faible représentation des femmes dans les instances politiques est-elle perdue ?

Pour ce qui concerne la faible représentation des femmes dans les instances politiques et de décision, la bataille est certes rude, mais nous ne l’avons pas encore perdu.  Il faut l’améliorer. Pendant des milliers d’années les hommes se sont imposés. Tout débute dès le bas âgé, il faut aussi éduquer.  Tant que Ali sera vêtu et Nani sera nue, tant que Gogo ira au marigot, et Tatie cuisinera, tant que Papa a une moto, et maman lave Nani, la promotion de la femme sera assez compliquée. Les gens pensent que c’est rien alors que cela a une influence sur le rôle et la place de la femme dans la société.

Bassératou K. 

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