L’assurance. Vie ou IARD est toujours la dernière des préoccupations dans la mise en place d’un business ou d’une entreprise. Encore plus chez des femmes qui pointe du doigt deux raisons : le manque de moyens financiers et celui de l’insuffisance d’informations sur les opportunités et types d’assurance en termes de prévoyance ou de protection financière à leur offrir. Beaucoup parmi des commerçantes ou entrepreneures ont enregistré d’énormes pertes. Au Burkina, il existe une dizaine de société d’assurances qui tiennent le discours contraire de toujours être disponible pour les clients, notamment les femmes. Qu’en est-il exactement ?

Une marchandise de près de 20 millions F CFA composé de pagnes, de chaussures, et de sacs acquis à crédit. Si plus de la moitié a été vendu pendant les fêtes de décembre 2022, une grande partie a été stocké dans le magasin au marché de Sankariaré.
L’argent en espèce était également bien gardé dans un coffre en bois. Une seule question taraudait l’esprit de Maimounata. « Comment vais-je remboursé ce crédit de plus de 20 millions F CFA ? Qu’ai-je fait à Dieu ? Qu’ai-je fait pour mériter cette sanction ? ». A l’approche du marché consumé par le feu, Maimouna s’est évanouie. Son réveil à l’hôpital s’est enchainé par des pleurs. Inconsolable. Des questionnements qui n’en finissent pas.

Dimanche 29 janvier 2023. Un dimanche noir pour Maimounata, vendeuse de pagne au marché de Sankariaré. Toute sa boutique a été consumé dans l’incendie qui a ravagé le marché. Un comité de crise a vite été mis en place pour venir en aide aux commerçants victime de cette tragédie. Les premiers questionnements ont porté sur l’assurance. La jeune dame n’avait aucune assurance, ni de vie, ni d’iard. Comme beaucoup d’autres commerçants dans le marché. Le défi de la prévoyance et de la protection financière reste encore à relever dans plusieurs domaines d’activités au Burkina Faso. Il est encore plus prononcé chez les femmes qu’elles soient entrepreneures, commerçantes, ou libérales.
Elles y pensent mais….
« Faites vites avec les commandes. C’est presque la fin de l’année. On n’a pas le temps », lance Mariam Soré à ses couturiers. Le ton monte. Téléphone à l’oreille et habillée dans une tenue de sa marque – MamySor-, à la question de savoir si toute la boutique est assurée, encore plus le matériel ou les marchandises (tissues, accessoires,), Mariam sourit d’un coin. « Quelle question ? », dit-elle d’un ton étonné. La réponse est toutefois rassurante. « L’assurance, j’avoue que c’est une préoccupation quotidienne. J’y pense tous les jours. Mais je n’ai pas encore pris une décision pour le faire. Sinon je sais qu’elle est très importante, tant pour sa vie que pour la vie de l’entreprise. D’ailleurs on le prend pour la voiture, pourquoi pas pour nos vies et nos biens. Et puis, il faut reconnaitre qu’on n’a pas assez d’informations sur les types d’assurances qui nous soient utiles », dit-elle. Si Mariam mesure la nécessité de souscrire à l’assurance, Edith entrepreneure dans le domaine de production de beurre de karité ignore la possibilité de souscrire à une assurance, qu’elle soit de Vie ou d’IARD.

« A la télévision, je vois parfois la publicité mais je ne me suis jamais informée sur le fond », dit-elle. Binta Barry, membre d’un groupement de femmes qui produisent des savons et du beurre voit également passé la publicité à la télévision.

Au sein du groupement, le débat est parfois effleuré quand elles pensent à des éventuels incidents qui peuvent subvenir. « Plusieurs fois, la présidente du groupement a évoqué l’importance de souscrire à une assurance au regard de l’important matériel que nous avons et les commandes qu’on envoi parfois à l’extérieur du pays. Mais la question d’assurance ne semble pas emballée beaucoup de nos membres. A vrai dire, on n’y comprend pas grand-chose », affirme la jeune dame.
D’individuel à SARL, le défi s’impose
De petit commerce de bouche à oreille ou encore en ligne, Odette Korsaga, promotrice de Odis cosmétique ne voyait pas trop l’importance de prendre une assurance. Des arguments ne manquent pas pour se justifier : « Par exemple, si je dois souscrire à une assurance qui me coute 100 000F ou 150 000F alors que mon fond de roulement annuel tourne autour de 50 000F, qui perd et qui gagne ? Aussi, on peut souscrire durant l’année et rien de grave ne va se passer. C’est l’assurance donc qui gagne puisque ce n’est pas remboursable », argue-t-elle. Oumou Ouédraogo, vendeuse de volaille fumé tient également cet argumentaire. « Avec le marché qui n’est pas fructueux, il est difficile de souscrire à une assurance sans grand Fonds », dit-elle la mine serrée. La donne a toutefois changé chez ces deux entrepreneures depuis mars 2023. D’entreprise individuel, le régime est passé à la société à responsabilité limité (SARL). Et Odette a changé de ‘’discours’’.
Dans le quartier Pissy, nous la rencontrons dans son unité de fabrication des produits cosmétique. Tout y est : savon de beurre de karité, huile de tomate, d’avocat, de citron, de gingembre, de carotte, de persil, etc. Un tas de carton emballé attend d’être livré hors du pays. Devant l’unité de production d’huile des sacs remplis de matières premières sont déposés. « Aujourd’hui là, ça va être compliqué de vous accorder un petit moment. C’es la fin de l’année et les commandes sont assez. Les gens font des cadeaux et bien d’autres surprises », lance-t-elle en se dirigeant vers l’unité de production d’huile. Odette Korsaga a maintenant une autre vision sur l’assurance qu’elle soit Vie ou IARD. Le temps d’un soupire, elle replonge dans le passé. 2020 : cette année Covid-19 mais surtout de l’inondation. La mine grise et les yeux presque remplis de larme, Odette témoigne avoir perdu des millions de FCFA. « Je n’ose pas dire le montant », dit-elle la voix cassée. « Mon usine a été inondé et tous les produits ont été détruits. Alors que j’en avais produit assez pour des commandes à l’extérieur et la covid-19 s’était aussi imposé », se rappelle-t-elle.

Le déclic de souscrire à une assurance est donc née. Depuis quelques mois, la dame a entamé des démarches pour assurer l’ensemble des biens, les commandes et le personnel. Il en est de même pour Oumou Ouédraogo qui se promet de souscrire à l’assurance IARD tout risque pour mener à bien ses activités de fumage de volaille et d’expédition dans plusieurs pays de l’Afrique et de l’Europe.
Pour la santé notamment des yeux, Elsie n’hésite pas
Elsie Tapsoba est consultante indépendante dans le domaine du suivi-évaluation et le rapportage des projets ou autres activités. Une activité libérale bénéfique selon elle. « Je discute de mes contrats et je suis payé en fonction du volume de travail », dit-elle fièrement. Ni bureau, ni matériel, encore moins de bien professionnels à sécuriser. L’assurance est toutefois une importance pour la jeune dame qui s’y souscrit chaque année. « C’est quand on est en bonne santé qu’on cherche de l’argent et la bonne santé s’entretien. C’est pourquoi je n’hésite pas à prendre l’assurance vie pour moi et mes enfants. J’ai personnellement des soucis de vision et l’entretient des lunettes coutent extrêmement chers. L’assurance me permet de souffler un peu à ce niveau », témoigne-t-elle. Il en est de même pour Ariana Zoungrana qui déplore le manque d’information sur les produits d’assurance. « On n’a comme l’impression que l’assurance, c’est pour les autres. Il faut aller vers eux ou suivre à la télé. Alors qu’il faut encore beaucoup d’explication pour permettre de comprendre », dit-elle peinée. La jeune dame dit être à sa première
Sauvée de la ‘’dingue’’ grâce à Dieu mais aussi à l’assurance
Le regard hagard, Fatim fait le film de son séjour dans une clinique en septembre 2023. Pendant trois semaines hospitalisée pour dingue sévère, les soins ont été possible grâce à l’assurance. « Quand je suis sortie de l’hôpital, j’ai décidé d’être une ambassadrice de l’assurance. A chaque fois que j’aurai l’occasion, je dirai à toute personne, tant qu’elle a la possibilité de souscrire à une assurance vie », témoigne cette mère de 3 enfants. Entre joies et peines concernant les agissements et l’attitude de la clinique, Fatim reste convaincue qu’elle a bénéficié de soins grâce à son assurance. A l’entendre, la clinique n’hésitait à faire aucun examen et à chaque fois, ils s’assuraient de l’assurance dont elle a souscrit.
Ignorance, manque d’informations, inaccessibilité, des sociétés de courtages d’assurance rassurent
« Il n’y a pas de produits d’assurance qui soient spécifiques aux femmes ou aux hommes », a d’entrée précisé Jérémie Bado, responsable de J&M Assurance, une société de courtage en assurance. Toutefois, poursuit-il : « Ce qui est intéressant est les sociétés d’assurance essaient toujours d’intégrer certains paramètres dans les assurances au sein des structures. Il y a par exemple une certaine garantie qui sont spécifiques à la femme notamment liée aux grossesses ou à certaines pathologies ».
Lorsqu’une structure est également dirigée par une femme l’on peut penser à des mesures spécifiques liées à la sécurité, à la protection, si fait que l’assureur peut orienter l’amélioration de la couverture ou accorder des avantages quand il s’agit plutôt d’un homme.
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A la question de savoir si des femmes entrepreneures ont ces informations, Jérémie Bado est dubitatif. Le coursier en assurance reconnait que les sociétés d’assurance ne communiquent pas sur certains détails et des explications ne manquent pas pour justifier ce mutisme. « Il revient à la personne qui veut s’assurer de fournir l’ensemble des informations pouvant permettre à l’assurance d’évaluer et de proposer des mesures. Ce qui requiert beaucoup de statistiques pour apprécier les risques », explique-t-il.

Entre autres données à fournir parfois : le chiffre d’affaires, le nombre d’employés, le matériel, etc. Ces informations peuvent donc influencer l’évaluation des risques. Quoi que, il peut toujours avoir dans les produits classiques des tarifications et des appréciations de risque qui vont varier en fonction du genre.
Mariam LINGANE/MoussoNews