Litterature: Djémilat fait parler les ancêtres dans « Les Murmures du passé »

Djémilat Dabone signe un premier ouvrage où un amour interdit entre jeunes Mossi et Bissa devient le miroir des fractures sociales. Dans ce livre intitulé Les Murmures du passé, elle, explore la force des héritages, les blessures du passé et les amours qui défient les traditions.

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« Les Murmures du passé » est un livre de Djémilat Dabone.

Djémilat Dabone est passionnée de lecture, d’écriture, de culture et de mémoire africaine. Pour elle, la lecture est un miroir mais aussi une passerelle entre les générations, un outil puissant pour interroger l’identité et les différences. Ce roman, révèle-t-elle, l’a habitée longtemps avant même qu’elle ne le couche sur le papier.

Les Murmures du passé raconte l’histoire de Zoundwéogo et Kénéma, 2 jeunes issus de communautés différentes, un Mossi et une Bissa dont l’amour est interdit par les traditions. À travers ce couple, l’autrice explore la réconciliation entre peuples, la force des héritages et la manière dont le passé continue de façonner les destins individuels.

Elle rappelle l’idée qui a porté son écriture. “Les défauts et les qualités n’ont pas d’identité. La méchanceté n’appartient à aucune ethnie, pas plus que la bonté”, souligne-t-elle.

Le roman se veut ainsi un dépassement des clivages, un rappel que l’histoire entre Mossi et Bissa, entre Yennenga et Rialé, est née d’un amour, et non d’une guerre.

Un titre habité par les voix anciennes

Le titre s’est imposé à elle très tôt: Les Murmures du passé.
Selon elle, il symbolise la voix des ancêtres, les vérités oubliées qui continuent de parler parfois à travers l’amour, parfois à travers la douleur.

Dans son récit, le passé devient un véritable personnage, un fil conducteur qui chuchote à travers les traditions, les silences, les interdits, guidant les protagonistes vers la compréhension de leur présent.

Des thèmes ancrés dans la société

Les murmures du passé aborde plusieurs thèmes majeurs dont l’amour interdit, les préjugés ethniques, la mémoire collective, les blessures héritées du passé, la réconciliation.

L’ autrice évoque également la tolérance, les réalités de la ferme africaine et la question de l’identité partagée.

 » au-delà des différences ethniques, nous partageons tous les mêmes émotions, les mêmes rêves.
Pour elle, l’amour peut devenir un pont là où les préjugés édifient des murs, et il est temps d’apprendre à nous regarder avec humanité »
a-t-elle lancé comme message principal.

En effet, roman n’est pas autobiographique, il s’inspire d’une réalité que l’autrice connaît : avoir grandi dans une société où certaines unions étaient mal perçues simplement en raison d’un nom ou d’une origine. Cette expérience l’a poussée à interroger ces préjugés à travers la fiction.

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Djémilat Dabone, à la dédicace du livre « Les murmures du passé, le 1 novembre 2025 à Ouagadougou.

Une psychologie fouillée et réaliste

Pour construire ses personnages, Djémilat Dabone a observé les gens, écouté les silences et les contradictions.
Chaque personnage représente une facette du pays : la sagesse des anciens, l’audace de la jeunesse, la force des traditions, les rêves d’un avenir différent.

Elle voulait qu’ils soient vrais, qu’ils portent la mosaïque culturelle africaine dans toute sa complexité.

L’autrice a choisi une écriture sensible, presque cinématographique. La tension naît des silences, des regards, des légendes racontées près du feu. Selon elle, elle a laissé “le silence parler”, faisant monter l’émotion sans cris ni excès.

Une écriture longue, perdue puis retrouvée

L’histoire a débuté en 2011. Après avoir perdu le premier manuscrit, Djémilat Dabone a tout recommencé.
Les années suivantes furent dédiées à la documentation, à la compréhension des symboles culturels, à l’étude des récits liés à Yennenga et Rialé, et aux discussions avec son entourage.
Ce travail lent et méditatif a abouti à la décision de publier le roman début 2025.

La plus grande difficulté a été de trouver la juste voix: Celle de parler d’un sujet sensible sans jugement, avec honnêteté et bienveillance. « Écrire sur ses propres réalités demande du courage », reconnaît l’autrice.

Djémilat Dabone n’a pas de rituel d’écriture fixe. Elle a eu une écriture spontanée. L’inspiration pouvait surgir tard dans la nuit, en pleine circulation, au point de l’obliger parfois à s’arrêter pour noter une idée, sur un bloc-note papier ou sur son téléphone.

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Djémilat Dabone est passionnée de lecture, d’écriture, de culture et de mémoire africaine.

Un accueil chaleureux du public

Depuis sa sortie, Les Murmures du passé reçoit de nombreux retours positifs. De l’avis de l’autrice, des lecteurs disent avoir été témoins ou victimes de préjugés ethniques et trouvent dans le roman un écho à leur histoire. Les encouragements d’aînés et de professionnels du milieu littéraire ont particulièrement touché l’autrice.

Pour Djémilat Dabone, Les Murmures du passé s’inscrit dans la lignée des œuvres africaines qui cherchent à concilier tradition et modernité. Le roman rappelle que les histoires, qu’elles parlent d’amour ou de douleur, ont une portée universelle.

Une adaptation déjà en préparation

L’autrice confirme qu’un film est en préparation. Le scénario est en cours d’écriture, avec l’ambition de tourner au Burkina Faso, dans l’authenticité des paysages et des symboles du pays.

Autres projets en cours, Djémilat travaille également sur un nouveau roman, lui aussi ancré dans les réalités africaines, tout en poursuivant la préparation de l’adaptation cinématographique de Les Murmures du passé.

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Djémilat prévoie d’adapter son livre en film.

Djémilat Dabone invite chacun à se connecter à son histoire personnelle. “Écoutez les murmures qui dorment en vous. Nos histoires anciennes ne sont pas derrière nous, elles marchent encore à nos côtés. Et peut-être qu’en les écoutant, nous apprendrons enfin à mieux nous aimer”, plaide-t-elle.

Annick HIEN/MoussoNews

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