Viol d’une élève déplacée interne mineure à Kaya : Avec son bébé au dos, Wendyam décroche le CEP

Wendyam (nom d’emprunt), 13 ans, et sa famille ont fui les attaques terroristes dans leur village natal de Ankouna, dans la commune rurale de Pensa, province du Sanmatenga (Kaya). Elles se sont installées à Kaya, une ville située à 100 km de la capitale, Ouagadougou. En milieu d’année 2022, en classe de CM1, elle a été violée par un quadragénaire, lui aussi déplacé interne. Un enfant est né de ce viol, en février 2023. Contre vents et marées, Wendyam, ou   l’élève déplacée interne (EDI), bébé au dos, ne désarme pas et ne ‘’lâche’’ pas l’école.   Soutenue par ses parents, ses camarades de classe et les enseignants de son établissement, elle a obtenu son Certificat d’étude primaire et son entrée en 6e, session 2023.  Malgré l’adversité, le traumatisme d’une enfance troublée, elle franchie les classes de 6e et 5e, haut la main avec respectivement 11,42 et 11,62 de moyenne, C’est toute l’histoire de Wendyam, les péripéties d’un combat titanesque pour la vie et contre le désespoir !

Ainée de sa mère, Wendyam, est une petite fille de 14 ans, native d’un village de la commune rurale de Pensa, à 130 km de la ville de Kaya, chef-lieu de la région du Centre-Nord. En 2018, alors qu’elle était en classe de  CE2, son village subit une attaque terroriste. La jeune fille et sa famille sont contraintes à un déplacement brusque et forcé. Et la localité qui semble être sécurisée est Kaya, chef-lieu de la région du Centre – Nord, à 100 km de la capitale burkinabè. Désormais, elles portent le statut de Personnes déplacées internes (PDI). A leur arrivée, dans leur nouveau cadre de vie, pendant que les parents se demandaient comment y passer la nuit, les enfants insoucieux admiraient le paysage urbain.

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Sa mère ( bébé sur les jambes) est restée aux côtés de Wendyam durant cette épreuve.

« Joyeuse et très curieuse, Wendyam veut en savoir davantage sur la ville. Elle multiplie les questions y relatives », se rappelle toujours, ce 3 juin 2023, la mère de la petite filleTrois ans après leur arrivée à Kaya, soit en 2022, la famille de Wendyam, réussira à se construire un logement dans une zone non lotie.  Après une année blanche, 2018-2019, Wendyam retrouve le chemin de l’école mais rétrogradée en classe de CE1 à la rentrée scolaire 2019-2020. Elle ne décolère pas. Elle réussit toutes les années suivantes jusqu’au CM2 en 2022-2023. Pendant les vacances, Wendyam, l’Elève déplacée interne (EDI) aide sa marâtre à vendre du poisson frit.  Assiette sur la tête, la petite commerçante ambulante arpente alors les ruelles des non loties à la recherche de clientsC’est au cours d’une de ses sorties au mois de mai 2022, aux environs de 12 heures, qu’elle tombe sur P.S, un quadragénaire, lui aussi PDI originaire de Pissila à une trentaine de km de Kaya, devant son portail.  L’homme  l’amadoue et l’attire dans sa chambre. Pour appâter sa « proie », il l’interpelle et achète son poisson à 1.000 F CFA. Une fois le poisson servi, sans remettre les sous, il lui demande de le déposer dans une des maisons de la cour. Wendyam, jusque-là, n’imaginait pas encore qu’elle avançait dans le schéma prémédité de son client de fortune.  Avec la naïveté qui va avec son âge, elle s’exécute. Dès qu’elle franchit la porte de la chambre, le prédateur la saisit brutalement, la maîtrise et passe à ‘’l’acte’’. 

Les inaudibles cris de douleur 

« J’ai commencé à crier. Pour étouffer mes appels au secours, il a bloqué ma bouche avec une de ses mains et immobilisé mes jambes avec ses pieds.  Il me piétinait également lorsque je cherchais à me débattre», se remémore douloureusement la petite, les yeux embués de larmes, sous le triste regard de sa mère bouleversée, en cette matinée du 3 juin 2023. Après sa salle besogne, l’agresseur remet enfin les 1000 F CFA à la petite Wendyam qui quitte la concession en sanglots. De retour à la maison, elle opte pour le silence.

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Le viol a eu lieu dans cette concession

Toujours désemparée par ce qui est arrivée à sa fille aînée, le regard baissé, ce sont les larmes aux yeux que la génitrice de la victime plonge dans ce dur souvenir.  « Elle a été violée à mon absence lorsqu’elle vendait le poisson de ma coépouse », appuie- t- elle toute mélancolique.

 Après le drame, la jeune fille décide de mettre fin à son activité de « commerçante » ambulante.  Malgré l’insistance de la famille, sa décision est sans appel.  Elle la justifie par son désir de suivre des cours de vacances organisés dans son école afin de se donner toutes les chances pour réussir son examen du CEP à la rentrée prochaine. La famille finit par fléchir et Wendyam suivra ses cours comme nombre de ses camarades de classe. C’est avec ce lourd secret qui la ronge au quotidien que Wendyam se prépare pour son examen du CEP, session 2022-2023.  Elle reprend le chemin de l’école comme si de rien n’était. Les jours passent, puis des mois, sans que l’on ne remarque quoi que ce soit sur la mineure, violée à  13 ans, quelques mois plus tôt. Pourtant, son physique avait commencé à changer. Au début de l‘année 2022, ses deux enseignants de CM2, Balkissa la titulaire et Amadé (des noms d’emprunt) constatent un changement fondamental chez leur élève. Wendyam ne participait plus aux « motivations », une pédagogie qui consiste en des petites histoires racontées en classe, avant le démarrage de chaque cours. « En octobre déjà, j’ai senti que quelque chose n’allait pas chez elle. Elle ne participait plus activement aux cours comme les années précédentes.  Aux séances de motivations, elle restait indifférente. J’étais convaincue qu’elle avait un problème.  Mais lequel ? », confie son maître, le 6 juin 2023.

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L’enseignante de Wendyam

Sa collègue Balkissa avait aussi les mêmes soupçons.  « Une fois, je l’ai interrogée au tableau et là, j’ai remarqué quelque chose de bizarre. Son ventre ressemblait à celui d’une femme enceinte. Le visage aussi avait éclairci.  Après, je lui ai demandé ce qu’elle utilisait comme pommade, car son teint avait fondamentalement changé. Elle a répondu qu’elle n’en utilise aucune», raconte l’enseignante. « Elle ne peut pas être enceinte. Il faut rappeler que c’est une fillette de 13 ans », se disaient les deux enseignants. Et comme son attitude et sa métamorphose physique persistaient, les deux instituteurs décident de lui parler. A la récréation, pendant que ses camardes jouaient dans la cour, Wendyam subissait un interrogatoire informel dans la salle. Première question : « Est-ce que tu as un problème particulier à la maison ? ».  Elle répond par la négative.  Ses enseignants reviennent à la charge : « Bientôt, ce sont les examens du CEP, s’il y a une difficulté particulière, c’est mieux de la signaler à temps ». Réponse invariable de la petite. Ils persistent et changent de tactique : « Si tu es enceinte, il faut nous l’avouer pour que l’on puisse prendre une dispense pour toi pour les épreuves sportives. Si on ne le fait pas maintenant, cela peut jouer sur ton résultat à l’examen ».  A cette observation, elle finit par cracher le morceau : « Je suis enceinte ! ».   Une nouvelle glaciale pour ses interlocuteurs !    « Nous sommes restés pendant deux à trois minutes sans piper mot. Nous ne savions pas par où commencer pour reprendre les échanges. Ensuite, elle nous a rassuré que sa mère   est au courant. », explique Amadé.

Le directeur a mis la puce à l’oreille du père

Très embarrassés, les deux maitres informent, séance tenante, le directeur de l’école, Abdoulaye (nom d’emprunt) qui, à son tour convoque la mère de l’élève à l’école qui confie que sa belle-mère aussi est au courant de la grossesse de sa petite fille, mais pas son mari.  Le directeur de l’école propose que la grand-mère informe le père de Wendyam Ainsi, elle pourra le contenir en cas d’éventuels débordements. Mais, la mamie refuse de jouer ce rôle. La maman change alors de ruse et dit à son époux que le directeur de l’école demande à voir les deux parents de Wendyam. Sans attendre, ils s’y rendent. Et le directeur utilise des tacts pour désamorcer la « bombe » qu’il devrait lâcher à la figure du père.  « Cher Monsieur, dans la vie, il y a des hauts et des bas.  Mais, le plus important, c’est de savoir gérer chaque difficulté avec maturité et sagesse », lance le directeur de l’école.  Le père pensait à tout, sauf à la nouvelle d’une grossesse de sa fille.  « Je voulais vous informer que notre élève Wendyam est enceinte.  Ce sont des situations qui arrivent malheureusement », lance- t- il. Le père reste calme sans broncher. Sans attendre sa réplique, le directeur enchaîne : « Il faut vous retenir et garder courage. Nous sommes disposés à accompagner votre fille pour son maintien à l’école. Nous allons également vous demander d’en faire autant. Dieu faisant bien les choses, elle dit connaitre l’auteur. C’est déjà bon qu’elle puisse l’identifier ».

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Le directeur de l’école berçant le bébé pendant que sa maman composait l’orale.

Ensuite le couple repart avec sa fille pour chercher le violeur et le ramener à l’école : un homme âgé de 43 ans. Il finira par avouer son acte et avec sarcasme. Le directeur  conseille aux parents de conduire leur fille au dispensaire pour des examens approfondis.  Après, la consultation, la maman fait part au directeur que sa fille est déjà à son 5e mois de grossesse.  Le père de Wendyam, rencontré au domicile familial, le même jour, ne s’est pas encore remis du drame subi par sa fille. Il fulmine : « Elle nous a raconté plus tard, que le monsieur l’a forcée. C’est un criminel !». La mine foncée, il soutient que ce monsieur n’en serait pas à son premier acte. « C’est son travail de tous les jours. A le regarder, il a l’habitude de violer les petites filles », martèle-t-il.

Maintenant que le secret a été dévoilé, l’école met tout en œuvre pour que la scolarité de Wendyam n’en pâtisse pas.  « Votre camarde Wendyam est enceinte.   Elle traverse des moments difficiles et c’est maintenant qu’elle a besoin de votre soutien à tous ». Tels sont les propos tenus par les enseignants à l’adresse de ses camarades de classe lors d’une rencontre de sensibilisation organisée à cet effet, dans son établissement. Ce n’était pas une surprise pour certains élèves.

Ses copines de classe le savaient déjà ! En juin 2022, soit un mois après le drame, les filles de sa classe avaient déjà la puce à l’oreille. Grace aux différentes activités menées par l’école sur la gestion des menstrues et la santé sexuelle et reproductive, les filles ont vu les premiers signes d’une grossesse apparaitre chez leur camarade. « Pendant les cours de vacances, en juin, elle dormait beaucoup en classe. Elle avait grossi et ses seins aussi ont pris du volume.  Ses pieds s’enflaient et    son visage était devenu clair.  Elle ne jouait plus avec nous. Par la suite, elle portait régulièrement des habits amples avec des voiles », explique B. Z, le 7 juin 2023. Mademoiselle B, soutient que pour éviter qu’elle ne prenne de la distance avec le groupe, les filles décident de ne rien demander concernant son état.  « Nous avons eu peur de lui demander. Voilà pourquoi nous avons gardé le silence.  Plus tard, nous avons appris qu’elle a été violée. Ce n’est pas de sa faute. C’est un drame qui pouvait arriver à n’importe qui d’entre nous », compatissent-elles. 

Le bébé de la classe de CM2

Ainsi rassurée du soutien de tous, la future mère-enfant commence ses consultations prénatales dans un Centre de santé et de promotion sociale (CSPS).  Elle met au monde, le 20 février 2023 par voie basse, une fille. « Elle a accouché sans difficultés.  Dans la soirée, les agents de santé nous ont libérés », confie sa mère, très soulagée. Vu son très jeune âge, la famille craignait le pire.   « On avait vraiment peur des complications, mais, par la grâce de Dieu, tout s’est bien passé », se réjouit la mère. Quelques jours après son retour à la maison, la famille du violeur a été informée de la naissance du bébé. Mais, personne n’a daigné mettre pieds dans la famille de la victime. Trois semaines après sa venue au monde, le bébé a été baptisé, Asmao (nom d’emprunt) par ses camarades de classe. « Un jour, mes camarades sont venues me rendre visite.  Elles ont profité demander le prénom de ma fille.  Je leur ai répondu, quelle n’avait pas encore de prénom. Ma grande mère, assise à côté leur a dit qu’elles pouvaient également proposer un prénom au bébé.  Et c’est là qu’elles ont choisi Asmao », soutient la nouvelle maman.  

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Ce sont les camarades de classes qui ont trouvé un prénom à l’enfant.

Contre vents et marées

 Avec son nouveau-né au dos, la jeune maman de 14 ans reprend le chemin de l’école, après deux semaines d’absence.  Les enseignants instruisent ses copines de classe de lui apporter les cours à la maison. Elle a pu se mettre à jour en recopiant et en bûchant toutes les leçons.  Toute chose qui a facilité sa reprise.  Elle participe alors aux trois compositions et obtient des moyennes mitigées au 1er, 2e et 3e trimestre.  Malgré ses faibles moyennes en classe, sa maitresse est restée confiante. « Elle a la chance de passer haut la main aux examens du CEP, car c’est une battante. Elle est très déterminée », confie Balkissa.  Et pour preuve, elle revenait suivre les cours à chaque fois que c’était possible après ces différents rendez-vous au domicile de son agresseur, au tribunal et au centre de santé. « Elle s’absente parfois juste une journée ou une matinée. Elle a suivi les cours du samedi 18 février et le lundi 20 février 2023, sa mère nous informe qu’elle a accouché d’une fille. Elle a repris les cours deux semaines après », informe-t-elle.

Elle salue, avec fierté, la détermination de son élève. Pour elle, Wendyam est un exemple de bravoure. Elle mérite d’être encouragée et accompagnée. « Si elle n’est pas soutenue, ce n’est pas   évident qu’elle puisse poursuivre son cursus scolaire. Elle est à féliciter », insiste son enseignante titulaire.  Elle est convaincue de la réussite de son élève. « Si tout se passe bien, je pense qu’elle va décrocher son diplôme », insiste-t-elle. Et pour empocher son diplôme, Wendyam multiplie ses chances en révisant assidûment ses cours. Et le plus souvent avec une de ses demi-sœurs et avec ses camarades à l’école. 

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Sac en main, Wendyam sur le chemin de l’école.

A son réveil, dans la matinée du lundi 5 juin 2023, la veille de l’examen du CEP, après les travaux domestiques, elle révise ses leçons.  Les nuits, surtout à l’approche des examens, elle ne ferme pratiquement plus l’œil, toujours avec ses cahiers.  Le jour de l’examen, à 3h du matin, elle était déjà debout. Elle prend d’abord sa douche, puis donne le bain a son bébé et presse le lait. A 4h20, avec Wendyam, et sa demi-sœur, nous prenons le chemin de l’école, où les enfants doivent composer dans quelques heures. Pour assurer la sécurité des filles, les deux mamans se joignent à nous. Après 20 mn de marche, nous-y sommes.  A la levée du jour, les mamans repartent à la maison, laissant les filles face à leurs devoirs.  N’ayant pas les moyens de s’acheter du biberon, sa maman lui apporte son bébé pendant les pauses pour l’allaitement.  Et c’est le quotidien de la grand-mère nounou, durant l’année scolaire et les trois jours d’examen.

Tout sauf du tô ce soir

A la découverte des résultats, le 20 juin 2023, Wendyam est déclarée admise, ainsi que les 61 autres camarades de classe.  « C’est une grâce. Elle a eu ce qu’elle voulait », s’exclame sa grand- mère, au téléphone.   Toujours au bout du fil, c’est un père qui ne peut pas contenir sa joie. Il n’a pas de mots pour rendre grâce à Dieu, à qui, il doit énormément pour avoir couronné sa fille de succès, malgré tout ce qu’elle a traversé. 

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Wendyam dans sa salle d’examen

Une joie amplifiée par l’admission au CEP de la demi -sœur de Wendyam.  « Les filles ont obtenu leur diplôme. Ça a marché !  Wendyam est rentrée », se réjouit sa mère. Le père de famille pense à fêter l’évènement.  Et pas du tô au menu. « Ce soir, nous allons manger d’autres choses, comme du riz ou des macaronis. En tout cas, ce soir, nous allons changer de nourriture.  Nous n’allons pas manger du tô ce soir !», insiste le père des deux futures collégiennes. Le lendemain de la proclamation des résultats, c’est une nouvelle Wendyam toute décontractée qui nous contacte. Au bout du fil, elle s’exclame : « Tantie, j’ai suffisamment dormi la nuit ! Je suis enfin soulagée ! J’ai mon CEP ! ». C’est avec la même joie, lorsqu’elle nous annonce son admission à l’entrée en 6e, plus tard, le 8 septembre 2023. « Tantie, j’ai eu mon entrée en 6e, ma sœur et d’autres camarades de classe aussi. Je suis tellement contente ! », s’écrie-t-elle. Chez les enseignants de son école aussi, c’est un ouf de soulagement total.

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La nuit, c’est avec torche que la jeune fille apprenait ses leçons.

Leur brave a relevé le défi. Très reconnaissante à ses éducateurs, la future collégienne rêve de devenir enseignante pour leur emboiter le pas.  Pour ses parents, avec le CEP et l’entrée en 6e en poche, leur fille doit poursuivre ses études, et ils comptent sur le soutien des bonnes volontés pour aider Wendyam à réaliser son rêve de devenir une enseignante. Pour apporter la même éducation aux enfants du Burkina Faso, à ceux en qui, elle se reconnaitra par son histoire douloureuse : les enfants victimes du terrorisme. Déjà cette année 2023-2024, elle a obtenu une moyenne générale de 11, 42 en 6e, et passe en classe de 5e. Une classe qu’elle franchie haut la main, avec 11,62 de moyenne.   

Mariam OUEDRAOGO

mesmira14@gmail.com

Le violeur de Wendyam condamné à 11 ans dont 7 fermes

P. S. est le violeur de la PDI mineure Wendyam. Il est originaire d’un village de Pissila, à une trentaine de kilomètres de Kaya. Du fait de la récurrence des attaques terroristes, P.S a quitté son village abandonnant son épouse et ses enfants. Accueilli par son jeune oncle à Kaya, dans le même quartier où réside sa victime, il s’adonnait à la maçonnerie pour gagner sa vie. De loin, on n’imaginerait pas une telle inhumanité entre des personnes en détresse, toutes victimes, de la même violence. Après son forfait, le père de Wendyam, très furieux, le traduit en justice. Il est placé en garde à vue au service régionale de la police judiciaire (SRPJ) de Kaya. Le 6 décembre 2022, le Procureur du Faso près le Tribunal de grande instance (TGI) de Kaya, par note référencée R.P 189/2022 PV N0182 du 3 décembre 2022 du SRPJ- Kaya, convoque la famille de la victime. Statuant en matière correctionnelle, le mercredi 14 décembre 2022, à 8h00 du matin, le tribunal l’entend comme prévenu coupable de viol Fait prévu et puni (FPP) par l’article 533-10 du code pénal. Le jour du jugement, le prévenu a été conduit de la police judiciaire au Tribunal. La victime, elle, était accompagnée de sa famille.  Son école a été fortement représentée par ses deux enseignants, le Directeur, l’Association des parents d’élèves (APE) et le Comité de gestion, (COGES).  Des associations de lutte contre les violences basées sur le genre et de défense des droits humains, comme le Mouvement burkinabè des droits de l’homme et des peuples (MBDHP) ont aussi effectué le déplacement. A l’appel du dossier dans l’après -midi, l’émotion était vive dans la salle du fait de l’âge de la victime, son état de grossesse et le rire moqueur du prévenu. Son attitude était révoltante selon le directeur de l’école de la victime.  « C’étaient les mêmes   rires moqueurs lors de nos premiers échanges à école. Il a été interpellé pour cela par le tribunal », se souvient-il.  Cette atmosphère crispée a été détendue par le verdict qui condamne ainsi P.S. à 11 ans de prison dont, sept ferme, d’une amende d’un million F CFA, assortis de sursis. Pour la famille, la justice a été rendue à sa fille. Toutefois, leur satisfaction est limitée, car aucune réparation n’a été annoncée, comme le prévoit la loi. Pour le MBDHP, le verdict est mitigé, mais reste dissuasif.  « Vu la gravité de l’acte, c’est bon pour l’exemple. Cela permettra de dissuader beaucoup de prédateurs », estime le président régional de la structure, Issiaka Ouédraogo. Quant à la présidente de l’Association des femmes pour l’éducation, la solidarité, la santé et le développement (AFESSD), Saïbata Sawadogo, le tribunal a été trop clément.   « Sept ans ferme, c’est peu, pour un criminel de cette trempe. Il devrait être suffisamment puni à la hauteur de son forfait pour, qu’à sa sortie, il n’ait plus le courage de récidiver ».

M.O.

Stopper la « saignée des bambines »

L’Association des femmes pour l’éducation, la solidarité, la santé et le développement (AFESSD) est basée à Kaya. Elle œuvre depuis 2013 pour la protection et la promotion des droits humains, des personnes vulnérables, des enfants, des filles et des femmes.  Avec la dégradation de la situation sécuritaire dans sa zone d’intervention, la présidente de la structure, Saibata Sawadogo relève une augmentions des cas de viols de femmes et de jeunes filles. Elle soutient que les viols des mineures surtout, des déplacées internes sont légion à Kaya. Et les bourreaux sont aussi bien parmi les PDI que les populations hôtes.  Dans la matinée du 7 juin 2023, elle revient sur le viol d’une jeune fille déplacée interne d’environ 16 ans. Cette dernière avait fui les exactions terroristes dans un département de la province du Sanmatenga, ayant occasionné le décès de son géniteur pour se réfugier à Kaya.   Avec sa mère malade, la jeune fille s’est lancée dans la vente des fruits pour subvenir à leurs besoins. C’est dans son porte-à-porte qu’elle a été agressée sexuellement par un jeune qui venait de s’enrôler comme Volontaire pour la défense de la patrie (VDP). C’était le 8 mars 2023, aux environs de 16h30.  L’agresseur a été condamné pour son forfait, confie-t-elle.

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Saïbata Sawadogo, de l’’Association des femmes pour l’éducation, la solidarité, la santé et le développement (AFESSD) est basée à Kaya

Le cas le plus emblématique, cité par Mme Sawadogo, est celui d’une mineure de 10 ans, violée en 2020 par l’un des voisins. L’agresseur, un jeune de 27 ans, a envoyé la fillette acheter du savon. C’est à son retour, qu’elle elle a été violée par ce dernier. Une fois à la maison, la famille a constaté les saignements.  Au début, sa mère pensait aux menstrues, parce que certaines filles ont des règles précoces. Après maints interrogatoires, la petite a fini par avouer avoir été agressée par un voisin du quartier. Elle a été aussitôt prise en charge par les services de santé. Une fois sur les lieux, la mère de la victime a souhaité taire l’affaire. A son tour, la famille de l’agresseur a fait recours au niveau du chef du quartier, à des leaders religieux et coutumiers pour étouffer l’affaire en demandant pardon.

Ecœurée par ces injustices, elle invite les populations à dénoncer ces actes ignobles. « J’exhorte les parents à éviter le silence coupable en dénonçant les abus sexuels, ainsi que les autres cas de violences basées sur le genre (VBG), car les victimes en souffrent ». Mme Sawadogo rappelle que la plupart des victimes sont issues des familles vulnérables dont des PDI.  Et ces mineurs sont obligés de travailler pour leur survie et ce, à travers des petits commerces et boulots très exposants. C’est dans le but donc d’éviter la « saignée des mineures » que l’AFESSD mise sur la sensibilisation et les pièges à éviter.  « Nous faisons de la sensibilisation et des causeries- débats pour orienter les femmes sur l’hygiène et gestion des menstrues, le planning familial », explique-t-elle. Forte d’une centaine de membres, l’association met l’accent sur les pièges à éviter. « N’envoyez pas vos enfants dans les mains des prédateurs. Pour 1.000 ou 2.000 FCFA de gain journalier, les fillettes restent dans la rue jusqu’à des heures indues », prévient-elle. Aussi, lors de ses sorties, elle exhorte les fillettes à ne pas cheminer seules. Elle les défend de rentrer dans les concessions où il y’a moins de personnes. « Les fillettes doivent impérativement éviter les tontons et les voisins gentils, surtout lorsqu’elles sont seules », ajoute-t-elle. Et de préciser : « La plupart des bourreaux ne sont pas très loin des victimes ». En plus de la sensibilisation, l’AFESSD prône la sédentarisation des filles afin de minimiser les risques d’agressions sexuelles. Un combat que les femmes de l’Association   mènent en initiant les filles aux métiers, tels que la fabrication du savon, la coiffure, la couture etc.

Mariam OUEDRAOGO

mesmira14@gmail.com

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