Vivre en belle-famille : Comment être belle-fille, épouse et mère à la fois

Dans de nombreuses familles africaines, le mariage ne se limite pas à l’union de deux personnes. Il implique souvent toute une maison : parents, frères, sœurs et parfois même coépouses. Pour les femmes, ce choix ou cette obligation de vivre en belle-famille représente un défi quotidien. Entre le rôle de belle-fille respectueuse, celui d’épouse attentive et celui de mère protectrice, l’équilibre reste délicat à trouver.

Naomie Ouédraogo, mariée depuis 8 ans, partage le toit familial avec ses beaux-parents et deux coépouses. Pour elle, la vie en communauté exige une grande dose de tact. « Quand je cuisine, je veille à demander l’avis de ma belle-mère et celui des autres coépouses. Même si parfois je sais mieux faire certaines sauces, je les laisse orienter. Ça m’évite les remarques », explique-t-elle.

Mais au-delà de la cuisine, c’est l’intimité conjugale qui lui paraît la plus difficile à préserver. « Le matin les enfants sont là et la nuit toute la famille, mes petits maris et leurs femmes aussi sont présents. Souvent je me sens gêné. Mais avec le temps, nous avons instauré nos petits moments à deux, tard dans la nuit, quand tout le monde dort », confie Naomie.

L’arrivée de la maternité a renforcé son sentiment de responsabilité. « Lorsque je suis devenue maman, je suis devenue ferme et autoritaire. Je me devais de protéger mes enfants et de bien jouer mon rôle de mère et c’était encore plus difficile pour moi. En effet, il fallait répondre aux attentes de ma belle-famille, de mon mari mais surtout de mon enfant », défend-t-elle.

« Comme un stage de mariage »

Miriam Ouédraogo, elle, s’est installée directement chez son mari et sa belle-famille après son mariage. Cette immersion brutale a été vécue comme une période d’apprentissage sous surveillance. « Chaque geste était observé : comment je balayais, comment je me comportais avec mon mari, surtout que ma belle-mère était fréquemment dans notre maison. J’avais l’impression d’être constamment évaluée », se souvient-elle.

Cette pression a fini par fragiliser sa confiance en elle. « Je me disais que peut-être que je ne suis pas une bonne épouse, peut-être que je ne mérite pas ce mariage. J’étais stressée, je ne dormais plus bien. Mais aujourd’hui, j’ai des enfants donc je ne cherche plus à plaire à tout le monde. Je fais de mon mieux comme épouse et mère », témoigne Miriam.

Comme pour Naomie, la question de l’intimité reste un défi permanent. « Avec mon mari, on n’avait pas d’espace à nous. Tout le monde entre dans la chambre sans frapper. Donc nos moments à deux se limitaient souvent à la nuit. Ce n’était pas l’idéal, mais cela a renforcé notre complicité et nos petites attentions au quotidien », ajoute-t-elle.

Une expérience qui peut aussi être une force

Pour d’autres, la vie en belle-famille peut se révéler bénéfique. Alice Nayaga, mariée depuis quinze ans, affirme avoir trouvé un certain équilibre au sein de la grande maison paternelle de son mari. « Bien sûr, il y a des frictions, mais pour moi, je pense que tout dépend de l’attitude que tu as avec les autres. Si on accepte que chacun a sa place et qu’on ne cherche pas à tout contrôler, la vie en belle-famille peut être plus facile qu’on ne le croit », estime-t-elle.

Alice retient surtout la solidarité et l’entraide. « Quand j’ai accouché, mes belles-sœurs m’ont beaucoup aidée. Mes enfants ont grandi entourés d’affection, avec leurs grands-parents. Moi particulièrement, j’ai été chouchoutée par ma belle-mère, je lui obéissais. Je ne contredisais personne », raconte-t-elle.

Pour elle, la clé réside dans la compréhension des rôles de chacun. « Quand on connait et comprend sa place, en belle-famille, on ne souffre pas. Surtout si ton mari est la source de finance », insiste-t-elle.

Vivre en belle-famille est une expérience contrastée : source de tensions pour certaines, facteur de réconfort pour d’autres. Si les femmes y portent une triple charge belle-fille, épouse et mère, elles partagent toutes la même réalité : celle de devoir composer avec les attentes multiples d’un environnement collectif, en puisant dans leur courage et leur résilience.

Astrid BAMA (Stagiaire) / MoussoNews

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