Le harcèlement dans le cinéma : Un sujet tabou mais essentiel pour les SOTIGUI Awards

« Le cinéma africain face aux défis du harcèlement sexuel ». Un thème « tabou » et « choquant », comme l’a signifié la réalisatrice burkinabè, Apolline Traoré a été au cœur de la cérémonie de lancement des SOTIGUI Awards 2025. Tenue ce mercredi 12 novembre, la cérémonie a également marqué la célébration des 10 ans d’existence de l’académie des SOTIGUI, devenu ces derniers temps un rendez-vous incontournable du cinéma africain.
Portée par Kevin Moné, l’Académie des SOTIGUI, a célébré ses 10 ans d’existence. La cérémonie inaugurale s’est tenue ce mercredi 12 novembre 2025 à Ouagadougou, marquant le lancement officiel d’une série d’activités qui vont mettre à l’honneur le cinéma africain et ses acteurs.

Pour ce jubilé, le thème choisi par la cinéaste Apolline Traoré se veut percutant et choquant. La réalisatrice a expliqué les raisons de ce choix courageux sur ce thème, qui selon elle, choque plus d’uns.
« Le harcèlement sexuel existe depuis la nuit des temps dans notre milieu, mais il reste un sujet tabou. Les victimes n’osent pas en parler, et cela cause beaucoup de dégâts. Pour les 10 ans des SOTIGUI, nous avons voulu aborder un sujet fort, nécessaire et trop souvent passé sous silence », a-t-elle déclaré.

La réalisatrice a insisté sur la nécessité d’ouvrir le débat, en rappelant que le harcèlement ne concerne pas uniquement les femmes. « Les hommes aussi sont victimes, parfois en silence, à cause de la pression sociale et de l’ego. Dans le cinéma, les rapports de pouvoir favorisent souvent des dérives, des avances insistantes ou des pressions indécentes. Quand quelqu’un dit non, c’est non. À partir du moment où l’on insiste, cela devient du harcèlement sexuel », a-t-elle ajouté.
Pour Apolline Traoré, il est temps que les langues se délient. « On peut être taquin, gentil, mais dès que l’autre se sent inconfortable, il faut s’arrêter. Il faut parler, aller vers sa famille, ses amis, ou consulter un spécialiste. Et si la situation est grave, saisir la loi », lâche-t-elle.
De ses mots, des voix très connues du cinéma burkinabè se sont jointes à la lutte à travers témoignages, dénonciation et conseils. Leïla Tall, actrice et comédienne a plutôt été ferme sur ce sujet : « Quand tu rentres dans le métier il faut avoir du caractère. Il y a une jeune fille, je l’a connais qui a abandonné car des doyens du milieu l’ont harcelé. On lui a proposé un rôle où on lui disait de se dénuder, après on lui dit de se déshabiller… », raconte-t-elle. De ce témoignage amer, elle lance un message : « Je dis aux jeunes filles, quand on veut vous donner un rôle, prenez le soin de demander le scénario au préalable », conseille-t-elle.

La comédienne Sergine Sourwaima, s’est réjouie de l’initiative, et a également porté sa voix en tant qu’actrice exposé aux risques du harcèlement et également témoin de scènes de harcèlement. « Même si je ne l’ai pas personnellement vécu, j’ai vu des collègues subir le harcèlement. Ce thème est essentiel pour délier les langues. Le tabou fait trop de victimes silencieuses. En parler, c’est déjà commencer à combattre le phénomène », a-t-elle confié.

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Les SOTIGUI Awards, 10 ans d’engagement et de perspectives
François Kouakou Adjabada, chargé de la sélection et de l’organisation des rencontres professionnelles à l’Académie des SOTIGUI, a dressé le bilan et les perspectives de cette décennie. Pour ses 10 ans, les SOTIGUI promettent une diversité d’activités. Il souligne la tenue de plusieurs activités telles que :
Deux panels dont l’un sur le cadre institutionnel du harcèlement sexuel, l’autre sur les moyens de prévention et d’accompagnement des victimes. Des projections de films, dont un long-métrage burkinabè et un film camerounais. Des ateliers de formation, des soirées festives et une visite des partenaires. Et enfin, la grande Nuit des SOTIGUI, prévue le samedi à Canal Olympia Ouaga 2000.

De ces années d’engagement de reconnaissance des acteurs du cinéma africain, L’Académie des SOTIGUI nourrit de grandes perspectives et aussi révolutionnaire. « Après 10 ans, nous réfléchissons à construire une grande salle de cinéma capable d’accueillir le public nombreux qui participe à la Nuit des SOTIGUI. Nous envisageons aussi la création d’une école de formation des acteurs », a-t-il annoncé.
Diane SAWADOGO/ MoussoNews



