« Le mouibongo des hommes est meilleur que pour les femmes », Kalmogo Adame

À Ouagadougou, les hommes aussi font du mouibongo… et avec succès. Ce plat populaire à base de riz trempé dans une sauce souvent à la pâte d’arachide n’est plus exclusivement préparé par les femmes. Ils s’illustrent aussi dans cette cuisine de rue, y trouvant non seulement une passion, mais surtout un moyen de subsistance durable.  

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Ouédraogo Sahidou vend du mouibongo depuis 14 ans.

Depuis 2011, Ouédraogo Sahidou vend du mouibongo dans une petite réserve à Bonheur ville. Âgé d’un peu plus de 30 ans, il a appris les rudiments de la cuisine auprès d’un particulier avant de se lancer. Son “restaurant” de fortune, bien connu des habitants du coin, s’installe dès l’aube : un grand plat de riz blanc soigneusement couvert de sachets plastiques, un autre rempli de spaghettis, des assiettes propres prêtes à l’emploi et une sauce toujours au feu.

Chez Sahidou, les clients, majoritairement des hommes affluent dès 6 heures. Il propose un mouibongo garni de spaghettis, de boyaux, de tripes, de viande rouge, agrémenté de choux, de soumbala et de piment.

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Madou, un client de Sahidou.

À midi, ses marmites sont vides. « Je mange ici tous les jours depuis longtemps. C’est moins cher et très bon », témoigne Madou, un client fidèle de Sahidou.
« C’est même meilleur que celui des femmes », renchérit Boureima, un autre client qui a écouté les conversations.

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Boureima prefère le mouibongo des hommes à celui préparé par les femmes.

Au-delà de Bonheur Ville, ce business est souvent répandu dans d’autres quartiers tels que Nagrin.

Clément (nom d’emprunt) propose dans son petit étal, du mouibongo à la sauce claire. Pas de pâte d’arachide comme le commun, juste du soumbala et quelques condiments avec de la viande. Pas trop bavard, il confirme avoir de la clientèle malgré cette différence dans sa cuisine. De 150 FCFA en allant, les prix sont aussi abordables chez lui où hommes et femmes se bousculent pour se remplir le ventre les matins avant de vaquer à leurs occupations.

Lire aussi: Honorine Badolé/ Bazié : Quand la vente du porc au four « se conjugue au féminin » – Mousso News

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Clément fait du mouibongo à la sauce claire.

Du mouibongo uniquement avec du poulet

Plus loin, toujours à Nagrin, non loin du château d’ONEA, Zoundi Adama fait sa petite fortune dans le mouibongo depuis environ 10 ans. À ses débuts, il était laveur de vaisselle auprès d’un homme qui fait aussi le mouibongo. Au fil du temps, il a appris à faire cette cuisine. Des années plus tard, Zoundi a ouvert son propre local loin de celui de son patron. Situé en face d’un maquis, Zoundi commence sa cuisine à 3 heures du matin dans une marmite numéro 20 et le 30 pour sa sauce. Il quitte les lieux qu’à 15 heures.

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Zoundi Adama, vendeur de mouibongo depuis 10 ans.

Contrairement à la plupart de ces restaurateurs qui font le mouibongo avec la viande, les tripes, boyaux et autres, Zoundi propose ses plats accompagnés du poulet. « Si ce n’est pas avec la viande de poulet, ce n’est pas bon. Aussi, avec la viande simple, il n’y avait pas de bénéfice », affirme-t-il en servant un de ses clients.

En moyenne, Zoundi Adama peut avoir 5000 FCFA de bénéfice par jour. Compaoré apprécie les tarifs et le riz du jeune Zoundi. « Son riz est parfait. Il n’y a pas plus abordable que les prix qu’on propose ici. Je ne viens pas ici tous les jours, mais dès que je ressens une faim les matins, je viens me régaler chez lui », admire-t-il en léchant ses doigts en riant.

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Chez Zoundi Adama, le mouibongo est accompagné du poulet.

Contrairement aux autres qui confirment ne rencontrer aucun défi majeur, Zoundi, lui, reconnait surmonter des difficultés. Il espère avoir son fond pour s’approvisionner en sacs de riz, en pâtes d’arachide afin de mieux s’occuper des enfants qui l’aident à laver la vaisselle et le service.

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Kalmogo Adame, un client de Zoundi Adama.

Mouibongo fait par les hommes ou par les femmes ?

D’aucuns attestent que le mouibongo fait par les hommes n’est pas à comparer à celui des femmes. Selon plusieurs consommateurs, les hommes le font mieux que les femmes. À les entendre, la différence serait aussi bien dans le goût que dans la rigueur.

« Le mouibongo des hommes est meilleur que pour les femmes. Je mange chez lui tous les jours, la nourriture des hommes est plus douce et bonne. Chez les femmes, tu manges et tu demandes ce que tu manges, parce qu’elles mettent beaucoup de choses, mais là, tu sais ce que c’est, la sauce pâte d’arachide. Leur riz est naturel. Je suis tranquille quand je mange la nourriture des hommes, j’ai plus confiance. Ma femme prépare, mais pour ici, c’est plus doux », confirme fermement Kalmogo Adame, un client de Zoundi Adama.

Tout en continuant de manger son plat, il poursuit en critiquant sévèrement les femmes. « Les dames payent des condiments sales pour faire la cuisine. Elles aiment trop les bénéfices. Elles s’en foutent de ce que ça peut causer chez leurs clients, qu’ils tombent malades ou pas après avoir mangé. Elles achètent des tomates pourries, des condiments pourris pour cuisiner. Mais les hommes, c’est juste la pâte d’ara et la viande et c’est doux », a-t-il lancé.

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Zoundi Adama devant ses plats de riz.

Les petites mains de l’ombre

Un point commun entre tous ces vendeurs : la présence d’enfants garçons ou filles affectés exclusivement à la vaisselle. Gobelets, assiettes, bols et plateaux, ils/elles veillent à maintenir un service fluide contre une modeste rémunération et parfois une prise en charge partielle. Ces jeunes aides sont bien souvent des frères ou sœurs des restaurateurs.

Annick HIEN/MoussoNews

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