Maïmounata Marie Béatrice Kéré : Psychologue, sentinelle des blessures invisibles

Maïmounata Marie Béatrice Kéré est celle capable de soigner des blessures invisibles. Psychologue, prompt à aider son prochain, elle est telle une bonne samaritaine, qui ne se gêne pas d’apporter son soutien aux personnes atteintes de troubles psychologiques. Retour sur cette écuyère de la psychologie au service de la communauté.
Maimounata Marie Béatrice Kéré est psychologue clinicienne et psychothérapeute au Comité International de la Croix-Rouge (CICR). Originaire du Centre-Est, c’est de là que s’est forgée une future leader du monde de la psychologie. Après l’obtention de son baccalauréat, elle a été admise à l’université Norbert Zongo de Koudougou où elle obtient sa Licence en Psychologie.

Elle est titulaire d’un Master 2 en psychologie clinique à l’université Joseph KI-Zerbo et psychothérapeute certifiée de l’institut Ellipsy à Paris. Toujours en quête de savoir, elle finalise actuellement une thèse de Doctorat en Psychologie clinique et psychopathologie. En termes de parcours professionnel, elle cumule 6 ans d’expériences dans le domaine humanitaire. À cet effet, elle a travaillé pour différentes structures humanitaires et depuis août 2022. Tel est le parcours exemplaire d’une battante qui se forge au fil des années pour répondre aux besoins de son pays.
Quelle est la tâche d’une psychologue ?
Sa tâche au quotidien en tant que psychologue au CICR est de veiller à ce que, dans les structures qu’il appui, les personnes affectées par la violence puissent accéder à des soins de santé mentale et psychosociaux de qualité. Concrètement, il s’agit pour elle de réaliser des évaluations des besoins, de proposer des stratégies de réponses et de s’assurer de la bonne mise en œuvre des activités sur le terrain.
Femme de terrain, Maïmounata est celle qui est toujours près des patients, des personnes vulnérables en quête de soutien ou de soin. Elle est chargée non seulement d’offrir la prise en charge psychologique aux personnes présentant des souffrances psychologiques, mais aussi d’encadrer les équipes sur le terrain pour des soins de qualité. À travers ces actions qu’elle mène, elle reflète parfaitement l’image de la femme battante toujours apte à prêter main forte à autrui.
« En tant que psychologue, je suis chargée d’intervenir principalement auprès des personnes présentant des souffrances psychologiques liées à différentes situations afin de leur apporter l’aide nécessaire au rétablissement psychologique », précise-t-elle tout fière de son métier noble.
Une oreille pour les femmes brisées
Toujours sur le terrain, à la rencontre des personnes ayant besoin de soins, Maïmounata fait toujours face aux réalités souvent amères. Selon elle, les femmes qu’elle reçoit présentent une grande vulnérabilité, surtout avec la situation sécuritaire actuelle. « La plupart sont devenues des cheffes de ménage suite au décès brutal de leur mari. Aussi, elles ont quitté leur village par contrainte vers d’autres horizons qui leur sont étrangers », relate-t-elle. Elle souligne par contre la résilience de ces victimes, qui, malgré leur état, n’hésitent pas à coopérer et témoignent de leur désir d’améliorer leur état lors des consultations.
Pour elle, il est fondamental, voire impérieux, de soigner les blessures invisibles qui sont les tueuses silencieuses et destructrices de l’avenir d’une société. « Comment une mère qui a des problèmes mentaux pourrait-elle se charger, n’en parlons pas, d’assurer l’éducation de ses enfants ? Etant le pilier de la famille, les autres membres de la famille ne seront pas épanouis sans elle », souligne-t-elle. Partant de là, elle affirme que l’avenir d’une famille, d’une société et d’une nation dépend fondamentalement de l’état mental de ses membres, et surtout de la femme.
Les zones à fort déficit sécuritaire, les camps de déplacés internes…, Dans ces lieux de recueillement de personnes vulnérables, Maïmounata fait la rencontre d’innombrables femmes qui ont connu l’horreur et sont en quête d’aides.
« Il y a tellement d’histoires, mais je partage ici l’expérience d’une mère de 4 enfants qui est arrivée à notre service sur l’orientation d’un agent de l’action sociale. Elle a été forcée d’assister à l’assassinat de son mari et de son fils aîné et, par la suite, obligée de fuir son village avec le reste des enfants sans rien emporter », se rappelle-t-elle amèrement.
Pendant plus de six mois, cette dernière peinait à gagner le sommeil ni à rester avec les autres. Entre troubles physique et psychologique, Maïmounata avoue que la victime a même tenté de se suicider. À travers la consultation psychologique, elle a pu être sauvée et reprend peu à peu le goût de la vie.
Ces vécus émouvants et à la fois victorieux sont pour Maïmounata une source de satisfaction et de motivation au quotidien. « Le retour positif des bénéficiaires, tel que « j’ai repris mes activités », « j’arrive à établir les interactions fructueuses », « j’arrive à bien dormir »… » Tous ceux-ci sont des motivations au quotidien qui me poussent à aller au-delà pour encore offrir ne serait-ce qu’un brin de sourire à ces personnes », lance-t-elle.
Portée par une foi profonde dans l’humain, Maïmounata ne désarme pas. Elle souhaite voir toutes ces femmes détruites par la guerre et l’exil retrouver leur dignité, leur paix intérieure, leur vie d’antan.
« Quel que soit votre statut, soyez toujours fière de vous-même et du trésor que vous êtes pour l’humanité. À celles qui sont affectées, n’hésitez pas à demander l’aide d’un psychologue. Ne vous découragez point, la famille a besoin de vous. Vous avez un quelconque trouble, confiez-vous aux psychologues, ce sont des professionnels qui travaillent dans la confidentialité », conclut-elle.
Diane SAWADOGO/ MoussoNews