Aides ménagères : Une maltraitance souvent de trop

Souvent très jeunes et venues des zones rurales, les aides ménagères sont accueillies dans des familles urbaines dans l’espoir d’un avenir meilleur. Mais, pour beaucoup, le rêve tourne vite au cauchemar. Elles nettoient, cuisinent, s’occupent des enfants… et pourtant, elles restent la plupart du temps incomprises. Au Burkina Faso, nombreuses sont les aides ménagères à subir des conditions de travail parfois dégradantes.

« Je me réveillais à 5 h et dormais à minuit. Si quelque chose ne va pas, s’il y a une incompréhension, on me frappe seulement », confie Safiatou Goro, une aide-ménagère de 12 ans.

Safiatou Goro est une déplacée interne qui a été sollicitée par la famille que nous appelons « X ». À peine arrivée, elle s’est retrouvée au bord du goudron, son sac d’habits sur la tête, abandonnée après un malentendu avec sa patronne pour non-maîtrise de la cuisine. D’après ses dires, c’est son patron qui l’a amenée.

Quatre (4) jours après le début de son service, une dispute éclate. Elle aurait cassé 2 assiettes en verre. 2 semaines plus tard, on lui demande de cuisiner du riz, une tâche qu’elle ne sait pas faire. C’est à la suite de cela qu’elle est mise dehors, dans un quartier inconnu, très loin de sa famille.

Comme elle, Mari Sanou, une adolescente de 15 ans originaire de Bobo Dioulasso, déclare recevoir des coups au quotidien.  « Le matin, à midi, le soir… ma patronne me donne des coups. Souvent, je ne sais même pas pourquoi. Parfois, quand je suis fatiguée et que je décide de ne pas travailler, elle me frappe », a-t-elle témoigné.

Elle se rappelle pourtant un début plus apaisé. « À l’époque, madame était gentille avec moi. Elle m’aidait dans les tâches, me donnait à manger tous les matins. Mais depuis que nous sommes arrivés ici et qu’elle a eu son premier enfant, tout a changé », raconte-t-elle.

Toutes ne vivent pas le même degré de traitement. À l’instar des 2 précédentes, Adjaratou Yaméogo, une jeune fille de 16 ans originaire de Fada N’Gourma, témoigne à son tour. « Moi, j’ai été confiée à ma tante pour venir chercher du travail à Ouaga. Quelques jours après notre arrivée, elle m’a amenée chez une autre dame et c’est là que j’ai compris ce qui se passe », explique-t-elle.

En plus du traitement qu’elle subit, Adjaratou raconte avoir été victime de comportements déplacés de la part du fils de son employeuse. « Il entrait dans ma chambre sans frapper, me touchait les bras, me faisait des compliments bizarres. Quand j’ai eu le courage d’en parler à ma patronne, elle m’a accusée de chercher des histoires », détaille-t-elle. Quelques jours plus tard, le jeune homme est parti à l’étranger pour ses études.

Lire aussi: Conditions des aide-ménagères et domestiques : l’ADDAD sensibilise les femmes dans les marchés – Mousso News

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Image générée par IA.

La parole aux employeuses : entre incompréhension et plaintes

Au-delà de la maltraitance, certaines employeuses estiment aussi que vivre avec quelqu’un d’autre entraîne forcément des tensions. Nèmata Kaboré, commerçante, explique avoir changé 3 aides ménagères en 2 ans. « Elles étaient toutes fainéantes. Les deux dernières passaient leur temps au téléphone et ne faisaient rien si on ne les surveillait pas. La première frappait mes enfants chaque fois que je sortais. »

Angèle Bagué, femme au foyer et mère de 4 enfants, affirme que certaines filles viennent de familles où elles n’ont pas appris les règles de vie. « Elles arrivent avec un mauvais comportement, refusent d’apprendre. Quand tu veux corriger, ça devient la guerre. C’est comme si on les avait éduquées pour vendre au marché », souligne-t-elle. Et d’ajouter qu’une fois, elle a surpris sa fille de ménage en train d’inviter un homme dans la cour en mon absence. « Je l’ai renvoyée chez elle. Moi, j’ai toujours bien traité les filles que j’embauche, mais franchement, c’est souvent compliqué », retoque-t-elle.

Sensibiliser pour changer les mentalités

Selon le décret n°2010-807/PRES/PM/MTESS du 31 décembre 2010 du Code du travail burkinabè, tout engagement professionnel, quel qu’il soit, doit être formalisé par une lettre ou un contrat écrit précisant le poste, le salaire, les avantages, la catégorie et la durée du contrat. Pourtant, la majorité des aides ménagères travaillent dans l’informel, ce qui rend difficile toute régularisation ou protection effective.

Toute fois grâce à des organisations telles que Alliance Féminine (AFEM) et Association de Défense des Droits des Aides Ménagères et Domestiques (ADDAD Burkina ), qui plaident pour la mise en place d’un statut légal clair et d’un mécanisme de surveillance dans les foyers, les mentalités commencent à évoluer même si le chemin reste encore long.

 Astrid BAMA (Stagiaire)/MoussoNews

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