Agriculture hors-sol : L’armes des femmes ”PDI” contre l’insécurité alimentaire
De Ouagadougou à Kaya en passant par Kongoussi, des femmes déplacées internes n’attendent plus une main d’assistance tendue. Feuille d’oseille, haricots, persils, tomates, oignons, etc…, elles pratiquent désormais l’agriculture hors sol – soit dans des pneus ou pots de saut d’eau- pour subvenir à leur besoin et ceux de la famille. Une méthode résiliente non seulement pour la survie mais aussi pour faire face aux changements climatiques.
Habibou Sawadogo est mère de 9 enfants. Elle a fui les attaques terroristes de Namissiguima en 2022 pour rejoindre Kaya dans la région du Centre-Nord du Burkina. Entre fabriquer du soumbala pour revendre et mener de petites autres activités, Habibou pratique également l’agriculture hors sol. Ce 5 juin 2024 à son domicile dans le secteur 5 de Kaya, un ‘’petit’’ jardin potager accueille dès l’entrée de la cour. On y constate des sacs en plastique remplie de sable. Là-dessus, poussent déjà des tiges de haricot. « Je l’ai planté la semaine dernière seulement (le 31 mai 2024, ndlr). Je l’arrose les matins et le soir. Si fait qu’ils ont vite poussé. D’ici la semaine la fin de la semaine, je pourrai revendre quelques feuilles en attendant les graines », indique Habibou, fièrement. Plus loin dans la cour, un autre petit potager de jardin dans lequel sont plantés du piment. « Le piment aussi pousse vite. Mais il a besoin de l’eau », dit-elle.
L’eau, ce liquide indispensable à la survie des plants
L’eau. Ce liquide précieux qui freine la grande production dans l’agriculture hors sol chez Habibou. En effet, depuis février, la quadragénaire utilisait l’eau du puit pour mener à bien ses productions. Entre mars à mai, le puit a séché. « J’espère qu’avec la saison des pluies qui s’annonce, le puit va encore se remplir », espère-t-elle. Avec sa fille de 17 ans, ‘’le champ de fortune familiale’’ est bien suivi au quotidien.
Son fils, Karim, 32 ans s’implique aussi. « A Namissiguima, nous faisons des activités de pépinières. Choux, tomates, oignons, aubergine. Et ça marchait très bien puisqu’il y a un barrage dans la localité. Mais depuis les attaques terroristes, nous avions été obligés de fuir. J’aide donc la maman ici à mieux produire », témoigne-t-il.
L’association bark’ zaca de Rastama Ouédraogo encourage l’agriculture hors sol
L’autosuffisance alimentaire à travers l’agriculture hors sol face aux changements climatiques, une conviction de Rasmata Ouédraogo, président de l’association Bark’Zaca pour le développement des jeunes et femmes de la région du Centre-Nord. Sous sa coupe : plus de 200 femmes en situation de vulnérabilité ou de déplacées internes. Pourquoi le choix de l’agriculture hors-sol ? Mme Ouédraogo le justifie par deux raisons : la pauvreté des sols de la région du Centre-Nord, mais surtout l’inaccessibilité des terres de plus en plus avec l’arrivée des déplacés internes. « Beaucoup de femmes ont laissé leur terre pour se retrouver à Kaya. Et si elles n’ont pas de terre, avec deux ou trois pneus, elles peuvent cultiver le gombo, l’oseille, le haricot », explique-t-elle. Rasmata Ouédraogo s’est donc engagée à venir en aide à ces femmes à travers les formations. « Nous faisons la transformation de graine de néré pour faire le soumbala. Et les déchets sont transformé en fumier organique. Ces compostes sont utilisés pour la production hors sol », dit-elle. Au sein de son association, les femmes déplacées internes sont organisées et chacune mène une activité génératrice de revenue.
Des productions destinées pour la consommation mais aussi la vente
Deux semaines. C’est le temps que durent la culture de haricot. « J’ai planté il y a une semaine et vous voyez déjà les feuilles », montre du doigt Ristana, déplacée internes résident le secteur 7 de Kaya. Comme Habibou, elle-aussi cultive pour d’abord les besoins alimentaires de la famille, puis la vente. Avec la rareté des pluies en saison, Risnata rassure que l’eau de bouillard est une solution pour la survie des plantes. A l’entendre, l’agriculture hors-sol, si elle est peut organiser peut-être une solution à l’autosuffisance alimentaire au Burkina.
Kongoussi, le ‘’futur eldorado’’ de la sécurité alimentaire grâce à l’agriculture hors sol
A Kougoussi, sur plusieurs lieux d’accueil des déplacées internes, l’on peut apercevoir des espaces d’agriculture hors sol. Au secteur 3, ce 1er août, le domicile de Edwige Zango est auréolé de verdure. « C’est beau ici », s’exclame la reporter de MoussoNews.
Dès l’entrée de la cour, un jardin potager vous accueille. Protégé par des tissus de fortunes à l’image d’une moustiquaire protégeant un humain, les plants sont mis en terre avec soins et suivi avec attention particulière. Ici, pointe du doigt, Edwige, nous cultivons que des aliments consommables entre 2 semaines à 1 mois. « L’oseille », cite la jeune dame souriante, est vraiment un aliment ‘’gentil’’. « Avec un peu d’eau, ils poussent comme des champignons », commente Edwige.
Le ministère l’encourage pour les déplacées internes
L’agriculture hors-sol, une initiative encouragée par le ministère au profit des personnes déplacées internes « L’agriculture hors-sol, selon le contexte du Burkina Faso est une technique de production de végétaux sans que leurs systèmes racinaires ne soient en contact avec le sol naturel », rappelle Boureima Nazé Traoré, Chef de service de la valorisation des aménagements, de la promotion des effets durables dont la question de l’agriculture hors-sol à la Direction Générale de la Protection Générale. Avec le déplacement des populations, elle est de plus en plus pratiquée. « Au regard de la rareté des terres cultivables, la dégradation des sols dù aux changement climatiques, l’insécurité aussi qui entraine le déplacement massif des populations et quand elles se déplacent, elles ont besoin de mener les activités qu’elles avaient l’habitude de faire dont la production », reconnait-il. Depuis quelques années, le ministère en charge de l’Agriculture s’est engagé à former beaucoup de déplacées internes.
Quelles cultures pour l’agriculture hors-sol ?
Les cultures les plus recommandé pour l’agriculture hors sol sont celle maraichères notamment les légumes, les fruits, les feuilles. La pratique présente plusieurs avantages notamment la possibilité de déplacer les cultures. Elle est aussi un outil didactique pour des enfants qui posent des questions de curiosité afin de connaitre les plantes mises sous terre à domicile. « Aussi, ils polluent moins l’environnement parce qu’ils sont dans des contenants, il n’a pas de perte de nutriments. Ils s’attaquent aussi aux effets des changement climatiques dont les inondations, les sècheresses, les vents, les intempéries », ajoutent Mr Traoré. A l’en croire, l’agriculture hors-sol est une véritable réponse au changement climatique car ils polluent moins l’environnement.
Annick HIEN/MoussoNews