Burkina : les écoles maternelles privées, un véritable fonds de commerce ?

« L’école maternelle est une étape essentielle du parcours des élèves pour garantir leur réussite scolaire. Sa mission principale est de donner envie aux enfants d’aller à l’école pour apprendre, affirmer et épanouir leur personnalité. C’est une école où les enfants vont apprendre ensemble et vivre ensemble ». Pour en savoir un peu plus sur cette structure, nous avons rencontré Kassoum BANCE, éducateur de jeunes enfants en service à la Circonscription d’éducation de base de Ouaga 5 pour mieux la cerner.

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Image d’illustration

La nécessité d’inscrire son enfant dans une école maternelle

Si la maternelle est perçue comme une étape importante dans la scolarisation d’un individu, c’est parce qu’elle est la base de l’apprentissage. Parmi les compétences acquises lors de ce passage l’enfant apprend à vivre en collectivité, en se familiarisant avec les règles qui l’entourent. L’école maternelle permet à l’enfant d’avoir un niveau d’éveil en rapport avec sa croissance tant au niveau socio-affectif, intellectuel et physique. C’est là que l’enfant établit des relations avec d’autres enfants et avec des adultes. Il exerce ses capacités motrices, sensorielles, affectives, relationnelles et intellectuelles ; il devient progressivement un élève. Il découvre l’univers de l’écrit et acquiert un langage oral riche, organisé et compréhensible. C’est pourquoi l’éveil très tôt, c’est à dire à partir du préscolaire (de 3 à 5 ans) est un tremplin pour harmoniser et se stabiliser dans son évolution. De l’avis de Kassoum Bancé, quand l’éveil n’est pas harmonieux et qu’il y’a une dimension qui prend le dessus sur l’autre, l’enfant se trouve diminué par rapport à ses camarades, donc dans une situation de déséquilibre.

De la floraison des écoles maternelles et des contenus didactiques !

Partout au Burkina Faso, surtout dans les grands centres, on assiste à une floraison des écoles maternelles qui ne répondent pas toutes aux normes prescrites en la matière.

Kassoum Bancé nous fait comprendre que dans le temps ce sont des retraités, des anciens du système éducatifs, en un mot des professionnels du système éducatif qui étaient les propulseurs de ces écoles et structures maternelles privées. De nos jours, le privé a pris le dessus sur le public et le public, du fait que le salaire soit une garantie, le challenge a perdu toute splendeur dans l’organisation du travail dans les maternelles publiques. Ce qui laisse entrevoir un enseignement de masse dépourvu véritablement d’action éducative.  Selon toujours Kassoum Bancé, les frais de scolarité dans les maternelles publiques ne permettent pas aux professionnels de mettre au profit des enfants toutes leurs connaissances pratiques car manquant de moyens conséquents pour mener à bien leur travail.

Alors, du fait que les maternelles publiques n’arrivent pas à absorber tous les enfants en âge de préscolarisation, le privé a connu une grande floraison.

Les écoles maternelles privées, un véritable fonds de commerce ?

« C’est un secteur qui marche, c’est un secteur que le privé a commercialisé faisant de l’école maternelle un commerce plutôt qu’une structure d’éducation », nous a laissé entendre Kasoum Bancé, éducateur de jeunes enfants et « c’est ce qui explique la disparité des frais de préscolarisation allant du plus bas prix au plus élevé donc variant entre 35 000 fcfa et 900 000fcfa. » Généralement ce sont des promoteurs qui embauchent un personnel à moindre frais pour faire plus de profit. Le paradoxe est que les frais sont élevés avec un contenu éducatif très pauvre car le personnel qui y travail ne sait véritablement pas ce qu’il doit faire et les promoteurs refusent aussi d’engager des professionnels pour un encadrement conséquent. Dans ces cas de figure, la tendance est de fonctionner à vase clos pour ne pas laisser paraître les insuffisances. Et pire, ils continuent leur chemin à l’insu des structures de surveillance, de vérification, de supervision et de suivi. « C’est un personnel qui, pour le plus souvent développe un plan d’affaire où les enfants sont le fonds de commerce pour la plupart du privé »

Les écoles maternelles disposent-elles d’un contenu didactique ?

Les écoles maternelles selon Kassoum Bancé ne disposent de programme didactique bien précis comme à l’école primaire. Qu’elles que soient les sections, les années ne sont pas les mêmes car dit-il « nous n’avons pas les mêmes états d’enfants et les enfants de la petite section de l’année dernière ne sont pas les enfants de la petite section de cette année. »

« Dès la rentrée, le personnel titulaire normalement éducateur, doit développer des initiatives pour faire ce qu’on appelle une étude des enfants, dégager les problèmes majeurs, et à partir des solutions, formuler des thèmes. Ces thèmes seront désagrégés en sous-thèmes et les sous-thèmes en centres d’intérêts et les centres d’intérêts en titres d’activité à dérouler » voilà le cheminement normal, a laissé comprendre Kassoum Bancé.

Comprenez donc que le programme de la petite section de l’année passée n’est pas applicable à la petite section de cette année, tout simplement parce que ce ne sont pas les mêmes enfants donc des problèmes et des besoins surement différents ; On agit en fonction des besoins alors que les besoins des enfants sont explicites car ils les montrent d’où toute la tâche de l’éducateur pour subvenir aux besoins de développement des enfants. « Le programme est donc une arme indéfectible et obligatoire de l’éducateur mais je suis désolé de dire que la plupart des écoles maternelles évoluent sans programme souvent ou avec un programme dépassé. Elles sont très peu ces maternelles qui ont élaboré un programme adapté et qui évoluent tout en mettant en cause souvent leur programme s’il n’est pas adapté aux besoins des enfants. Les enfants peuvent connaitre un bond très rapide de développement, de leur croissance et vont solliciter plus et il faut que l’éducateur s’adapte. C’est là le hic dans la plupart des écoles maternelles privées où le personnel ne peut pas répondre à cet impératif. C’est dire alors que le système est compliqué et ne fonctionne pas comme l’Etat le voudrait. Je ne sais pas où se trouve le blocage mais il s’agit ici d’interpeller les structures déconcentrées afin qu’avec un personnel adapté, le travail soit conséquemment organisé. Que les techniciens puissent suivre le travail sans l’intrusion de personnes non qualifiées qui empêchent que le travail soit bien fait dans le sérieux et la rigueur. »

A.S/O

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