Koudougou : Des tisseuses sur le fil rouge

Dans la cité du cavalier rouge, les tisserandes sont confrontées à un défi majeur : La mévente des pagnes. L’essor des femmes dans le tissage a saturé le marché rendant la concurrence féroce et les ventes difficiles. Cette réalité soulève des questions cruciales sur l’avenir de leur métier.

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Jacqueline Sama, étudiante et tiseuse de pagne à Koudougou.

A Koudougou, la quasi-totalité des femmes se tournent vers le tissage de pagne. Cela entraine une saturation du marché et une baisse des ventes. Trop de pagnes, trop peu d’acheteurs. C’est le cas de Jacqueline Sama qui peine à écouler ses productions et a décidé de ne tisser que sous commande.

Etudiante en Sciences de l’Information Documentaire à l’Université Norbert Zongo, Jacqueline Sama vit du tissage des pagnes depuis plus de 2 ans.

Assise confortablement sous un arbre, à l’ombre apaisante des branches à son domicile au secteur 5, Jacqueline tisse un pagne pour une cliente. D’une taille moyenne avec une silhouette assez mince, son teint noir brille légèrement dans la lumière tamisée. Elle est vêtue d’une longue robe de pagne cousu et est coiffée de tresse naturelle.

Devant elle, la machine à tisser émet des bruits réguliers, un cliquetis rythmique se mêle au bruissement des feuilles au-dessus d’elle. Ses mains se déplacent rapidement, passant d’un fil à l’autre, tandis qu’elle ajuste la tension avec soin. On entend le frottement des fils qui glissent les uns contre les autres, un son doux et familier évoque des heures de pratique. L’atmosphère est tranquille, c’est un moment de créativité et de concentration, où chaque geste de Jacqueline est empreint de passion et de dévouement pour son art qui est en semble être en péril.

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De 6000 FCFA, des tisseuses vendent leurs pagnes à 3500 FCFA pour avoir de quoi subvenir à leurs besoins

De 6000 FCFA à 3500 FCFA

Face à la mévente des pagnes tissés, de nombreuses tisserandes les offre à des vils prix pour avoir de quoi survivre. De 6000 FCFA le pagne, ces tisseuses font un rabais considérable de prix. «Presque toutes les femmes font le tissage de pagne maintenant à Koudougou. Sur 10 cours successives, près de 8 font le tissage. Les pagnes ne s’achètent plus au point que d’autres femmes préfèrent les vendre à petits prix. De 6000 FCFA, elles les vendent à 3500 FCFA pour avoir de quoi subvenir à leurs besoins. Le métier n’est pas simple, à cause de cette concurrence, le prix de la vente même ne vaut pas l’argent utilisé pour l’achat des fils », informe Jacqueline toute mécontente. Pour éviter de grosses pertes, la jeune tisseuse âgée d’une vingtaine d’années ne fait ses productions que sous commande dont sa cliente actuelle est Awa Christine Beda.

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Awa Christine Beda, une cliente de Jacqueline Sama.

Le contexte sécuritaire, un défi pour certaines tisseuses de pagnes

A l’autre bout de la ville, Hélène Daboné est également touchée par la mévente de ses pagnes. Tisseuse depuis plus de 3 ans, elle déplore la situation sécuritaire qui lui a fait perdre une grande partie de sa clientèle.

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Hélène Daboné , aussi une tisseuse de pagne.

Mère de 3 enfants, elle use d’une diversité de motifs et de techniques de tissage pour se démarquer dans ce marché de plus en plus encombré. « J’avais un grand nombre de grossistes dans certaines localités du Burkina à qui j’expédiais mes pagnes. Mais avec l’insécurité, la grande partie est déplacée interne dans des villes. Ils n’ont plus assez de moyens pour faire des commandes », indique-t-elle d’un air triste. Ne sachant rien d’autres concevoir de ses doigts, elle n’a que le tissage de pagne comme source de revenu.

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Trop de pagnes, trop peu d’acheteurs. Les étals se remplissent pendant que les espoirs de ces tisseuses s’amenuisent. Elles voient leur savoir faire perdre de leur valeur. Et lentement, ces sont les fils qui se dénouent.

Annick HIEN/MoussoNews

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