Ouagadougou : victimes de violences conjugales à prostituée ‘’VIP’’ le témoignage émouvant des femmes

« J’ai été nourri et logé par des prostituées dites ”VIP” pendant deux ans », confie Ariane, la filleule d’une prostituée. A Ouagadougou, ces travailleuses de sexe de haut niveau et de luxe sont en grande majorité victimes de violences conjugales ou de rejet par la belle famille. Certaines se sont confiées sous l’anonymat. MoussoNews a choisi de publier ces témoignages à l’occasion des 16jours d’activisme contre les violences à l’égard des femmes.

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Image extrait du film – La Villa Rouge- d’Aboubacar Diallo

La prostitution, souvent qualifié de métier le plus vieux au monde, a longtemps été essentiellement exercée par des femmes, alors que les bénéfices revenaient le plus souvent aux hommes qui se considéraient comme leurs propriétaires. Cette conception prévalait jusqu’à la fin du XIXe siècle. Une personne se prostitue lorsqu’elle accorde des faveurs sexuelles à autrui en échange d’argent, de cadeaux ou d’une autre forme de rétribution. La pauvreté est à l’origine de l’utilisation du corps comme une marchandise. La loi ne qualifie de prostitué(e)s que celles ou ‘’ceux’’ qui proposent ouvertement de telles transactions sexuelles. Pourtant, aucun gouvernement n’est parvenu à éradiquer ce fléau.

Au Burkina Faso, la prostitution a longtemps été un métier illégal voir défendu, il n’en reste pas moins qu’elle bat son plein dans de nombreux quartiers de la capitale (Dapoya, le marché Sankaryaaré, la rue Zoom-Koom, l’avenue Dimdolomson, Toybi, Koulouba, Kwamé N’khruma etc.), au détriment de la quiétude des populations.

Si une nouvelle génération de filles/femmes se livrent à ce qu’elles appellent « La sortie VIP », une forme de prostitution pour offrir du plaisir au hommes, certaines parmi elles, des victimes de violence conjugale et rejet de la belle famille se voient également obligées d’emprunter cette voix.

Prostituées malgré elles

« Je suis mère de deux enfants. Mariée, chaque nuit était longue pour moi. Mon mari me battait à chaque fois sans qu’aucun membre de sa famille n’intervienne. Un jour j’en ai eu marre et j’ai alors préféré fuir loin de lui pour trouver refuge n’importe où, n’importe comment, chez n’importe qui. Comment faire pour me nourrir. Le chemin le plus simple était la prostitution. J’ai commencé à travailler dans les bars et restaurants, puis dans des hôtels. Je fréquentais d’autres hôtel à la recherche de clients. Chaque relation sexuelle était un calvaire mais je n’avais pas le choix. Il faut nourrir les enfants », raconte Fatou (nom d’emprunt).

La jeune dame confie en avoir prix aujourd’hui goût et fixe son cachet en fonction du client. En plus de ses enfants, elle éduque une autre jeune fille qui dit du bien d’elle. « Fatou peut être tout mais je lui dois ma réussite. Elle se prostitue pour prendre soins de nous », dit-elle.

« Je gardais ses enfants lorsqu’elle sortait se prostituer »

Djélika (nom d’emprunt) a elle aussi fuit son foyer. Mère de trois enfants, elle dit avoir subi tant de violence corporelle chez son homme et les injures de ses belles sœurs. Elle aura fini par abandonner son foyer pour se retrouver sur le marché du sexe. Seule avec ses enfants, elle prend en charge une jeune fille qui témoigne. « J’étais beaucoup persécuté dans la famille à qui ma mère m’a confié. J’ai donc fui pour venir chez Djélika. Je savais qu’elle se prostitue. Je gardais donc ses enfants et je faisais le ménage pour elle. Elle a véritablement pris soins de moi. J’ai poursuivi mes études jusqu’au BEPC et ensuite, je suis allée à Ouahigouya ou j’ai été recruté comme animatrice dans une radio. Gloire soit rendu à Jésus-Christ aujourd’hui je travaille dans une association d’aide à l’enfance et je suis mariée depuis 2015. Comme l’apôtre Paul je peux dire que ‘’Je suis ce que je suis par la grâce de Dieu’’ qui m’a sauvé et qui a envoyé Djakila comme ces corbeaux qui ont nourri Eli lorsqu’il tentait d’échapper à la mort pour prendre soin de moi à une époque de ma vie où tout semblait s’obscurcir du fait des violences que j’avais subi », confie la jeune dame.

«  Je suis malade et je pourrai mourir bientôt »

Alice (nom d’emprunt) traine aujourd’hui une maladie mortelle qui ne l’empêche cependant pas de poursuivre son business du sexe. « Je dois bien mourir de quelque chose », dit-elle. Egalement victime de violence conjugale, elle a trouvé refuse dans la prostitution pour nourrir sa famille. « Cela fait plus de huit ans que je suis dans la prostitution. Au début je faisais le trottoir sur une avenue avant de migrer vers les boites de nuit, puis les hôtels », confie-t-elle. Alice a pu construire une villa dans la prostitution. « Je suis le numéro que compose beaucoup de miniers. Ce n’est pas une belle vie et surtout pas honorable, mais il me semble mieux que d’être dans un foyer ou chaque jour est une tristesse », dit-elle tristement.

Des femmes ne savent pas à quel saint se vouer.

Plusieurs associations tentent d’accompagner ces femmes pour le suivi de leur santé sexuelle.  «Nous avons lancé un programme pour aider les filles qui se prostituent à se dépister gratuitement chaque trois mois, à utiliser une méthode contraceptive de leur choix en plus des préservatifs que nous leur offrons gratuitement. Elles bénéficient aussi d’une consultation gratuite lorsqu’elles sont malades et nous leur donnons de l’essence (1000f) chaque fois que nous tenons une rencontre avec elles. Malheureusement, ce programme s’étale sur deux ans et il en est à sa dernière année. Nous avons aussi décelé des maladies graves chez certaines des femmes de l’association   et malgré tout, elles continuent d’exercer leur commerce sans aucune forme de retenue. C’est regrettable mais bon !  A quel saint peuvent-elles se vouer ? », indique Docteur Hema, gynécologue soignante. Il est encore plus difficile, poursuit-elle de suivre les prostitués de luxe en ce sens qu’elles ne sont pas enregistrées.

Des regrets au quotidiens 

Ce n’est pas une vie, la prostitution qu’elle soit en trottoir ou en VIP” affirme Fatou qui dit ne jamais conseiller une femme à prendre ce chemin quelques soit les problèmes. ” Chaque passage avec un homme te met en conflit avec ta conscience. Tu perds ta dignité de femme. Oui, tu pourras dire que tu le fais pour tes enfants, mais tu es profondément malheureuse et triste”, relate la jeune dame la voix basse. Djelika, quant à elle, rappelle son mal. ” Je ne l’aurai pas si mon époux me battait pas. Je l’ai dit, on doit forcément mourir de quelque chose, mais avec dignité”, dit-elle.

ZHR pour Mousso News

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