Chronique : les – hummm- de Mariam Vanessa Touré sur la dépression et le stress

Pendant qu’un agent de la Fonction publique déprime par manque d’activités, un autre stresse à cause d’une inflation d’activités. Dans un climat paradoxal, celui qui se plaint du manque de travail partage le même bureau avec l’autre qui se morfond d’une surcharge de travail. Les extrêmes se toisent et la satisfaction devient un leurre.

Telle est la situation actuelle dans bon nombre de services de l’Administration publique burkinabè. Beaucoup de fonctionnaires vivent un véritable calvaire. Il y a les préférés d’un côté et les laissé-pour-compte de l’autre. Bien de raisons expliquent cela.

Hummm… La notion de patron, de responsable ou encore de supérieur hiérarchique est parfois perçue comme un avantage ou un poste où l’on fait travailler les autres à sa place, plutôt que d’être un vrai leader animé par la culture de résultats. A peine nommé, l’on constate aussitôt un ballet de changements à la tête des différents services.

Un cercle constitué «d’hommes de confiance» se forme immédiatement autour du nouvel élu qui confie tout le boulot à ses “bras droits” au détriment d’autres dont on se méfie pour X ou Y raison.

Il s’agit de ce fait d’accorder des privilèges à ce cercle de fidèles tout en isolant ceux qu’on considère comme des ennemis. Perçu au départ comme un avantage, cela peut se révéler très lourd par la charge du travail à accomplir au quotidien et devenir très vite déprimant pour le privilégié.

Dans le bureau d’à côté, ceux qui ont fait partie de l’ancienne équipe, sont priés de débarrasser les lieux, dans le langage courant ils sont mis au garage. Leur seul pêché est d’avoir travaillé avec le prédécesseur ou qu’ils aient entretenu avec ce dernier la moindre petite affinité. Il faut reconnaître aussi que beaucoup mettent du zèle à servir les hommes plutôt que l’institution. Car les hommes passent et l’institution demeure. Tombés en disgrâce ou considérés comme tels, commence alors pour eux une longue traversée du désert, une attente faite d’agonie où stress et dépression se conjuguent.

Hummm… Sur les «bancs de lamentations» dont plusieurs administrations disposent, beaucoup d’agents se tournent les pouces car ils ne sont pas dans les grâces des nouveaux élus. Place aux nouveaux princes et princesses en attendant un autre changement. Oui, ils vous diront que c’est comme ça, c’est leur temps. Et bonjour les intrigues, les crocs-en-jambe, etc.

Certains se retrouvent affectés dans des services loin de leur profil où professionnellement ils ne peuvent pas être productifs. Les plus chanceux se retrouvent dans des bureaux qui n’en sont pas vraiment un, aucun matériel de travail ni dossiers à traiter. D’autres s’entendront dire, il y a manque de locaux, on vous rappellera lorsqu’on en aura trouvé ou un autre point de chute. Combien de fonctionnaires sont aujourd’hui des “bras cassés” de l’Administration publique. Bien malin qui saurait répondre.

Dans cet univers de concurrence malsaine, tomber malade, est de fait un signe d’arrêt de mort. Que la maladie soit la résultante du stress ou la dépression, l’Administration n’en a que cure, on dira tout simplement que personne n’est irremplaçable. Et tout semble être mis en œuvre pour que vous ne reveniez plus. Commence une longue attente qui peut durer des mois voire des années. L’agent “malchanceux” n’est pas à la retraite mais c’est tout comme.

D’aucuns diront qu’il a son salaire, mais que vaut un salaire pour un salarié consciencieux qui est finalement payé à ne rien accomplir comme tâche.

À coup sûr, il meurt professionnellement s’il ne trouve pas d’autres alternatives ou centres d’intérêt. Bonjour la dépression de se sentir inutile à 30 ans, 40 ans, car malheureusement aucune tranche d’âge n’est épargnée. Et ce sont les mêmes qui rapporteront qu’il veut pas travailler en omettant de dire que ce sont eux qui ne lui confient aucun boulot. Ainsi des compétences sont inexploitées et des carrières détruites.

Hummm !!! Le copinage, le népotisme, le régionalisme et la politique ont gangrené l’Administration publique. La délation, la vengeance et l’exclusion sont érigées en règles de gouvernance. Ainsi, des agents taxés de pro tel régime, pro tel ministre ou ancien ministre, pro tel DG ou directeur ou tel autre chef de service ou encore l’ex du prédécesseur. Pour un pays qui a connu une succession de régimes, de dirigeants et de gouvernements, imaginer le nombre de « pros un tel » qui sont sur la touche. Des étiquettes que beaucoup traînent malheureusement et qui leur valent des exclusions sans nom. Quel qu’il en soit, ne dit-on pas que l’Administration est une continuité ? Travailler sous quelqu’un veut-il dire qu’on travaille pour lui ou pour l’Etat ?

Il est donc important de manager autrement, par la quête permanente de l’équilibre. Mais aussi en privilégiant le professionnalisme et la valorisation des compétences d’où qu’ils viennent et qui en est porteur. Au final, la cohabitation de la dépression et du stress est aussi bien nuisible pour les travailleurs que pour leur rendement. Ce sont les maladies professionnelles les plus en vogue actuellement.

Conséquence : c’est toute la Fonction publique qui en sort perdante.

#hummm #mariamvanessatoure

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